C’est le 7 mars prochain que le tout nouveau roman fantastique des éditions Alire, Au bout de la folie, arrive en librairie. Son auteur signe sous la plume de Miguel Ardan, un pseudonyme qu’il utilise pour des raisons personnelles. Saurez-vous reconnaître cet auteur québécois grâce à son style ? En tout cas, avec ce roman original et audacieux, il nous amène littéralement au bout de sa folie et nous laisse déroutés, mais aussi complètement époustouflés par son dénouement.
Résumé : Luc Berger, écrivain au succès plus que modeste, n’est pas suicidaire, pourtant il souhaite devancer sa mort. Il n’est pas triste, ne souffre pas de dépression ni d’un quelconque « mal de vivre ». Mais il veut mourir, ou du moins se retirer de cette société qu’il abhorre. C’est dans cet état d’esprit qu’il quitte la grande ville pour Mont-Tombelle, le trou perdu de son enfance, là où l’attend l’hôtel de ses parents, dont il vient d’hériter. Dès son arrivée, s’il reconnaît plusieurs anciens, Luc est surpris par tous ces nouveaux visages, toutes ces nouvelles personnalités qui pullulent au village. Comment une si petite place peut-elle avoir attiré une faune aussi hétéroclite en si peu de temps ? Or, dès qu’il apprend à mieux connaître chacun des nouveaux venus, un terrible doute l’assaille : et s’ils étaient tous à Mont-Tombelle pour lui ou, pire, à cause de lui ?
En lisant le résumé du livre et l’entrevue avec l’auteur, j’ai tout de suite eu envie de lire ce roman pour le moins inusité et intrigant.
Il va sans dire que dès les premières pages, on cherche à comprendre qui est Luc Berger et pourquoi il semble si déterminé à se tuer à petit feu. Car, comme il le dit si bien, il n’est pas suicidaire, mais il veut se retirer de cette société qu’il abhorre. En plus de Luc (Luke Sheperd The highwayman de son surnom), il y a une panoplie d’autres personnages tous les plus étranges les uns que les autres, qui ont tous des liens entre eux et sont identifiés par un nom et un surnom également, ce qui, je dois l’avouer, a été mélangeant à quelques occasions au début, surtout que nous changeons de personnages à toutes les deux ou trois pages.
Cela étant dit, j’ai trouvé fascinant de découvrir ce village, ces habitants, leurs relations, mais surtout leurs déviances, leurs violences, et également leur conscience environnementale et leur souci pour le futur de leur planète. Cela pouvait sembler sombre par moment, mais avec un tel roman, on a juste le goût de lire la suite, pour tenter de faire des liens et comprendre les agissements de chacun. Mais plus on avance dans l’histoire, plus les gens meurent, plus certains agissent bizarrement, et moins l’on semble comprendre le noyau de cette histoire.
En fait, ce n’est que vers la page 211 que l’on nous donne accès à la vérité, la clé de compréhension, la pièce manquante du casse-tête et que les liens se font dans ma tête et que je comprends enfin les agissements, les personnages, les événements. WOW! Quel punch ! Je suis KO, car je n’ai rien vu venir. Et pourtant, on a des indices partout, même dans le titre et le résumé du livre, mais je ne le voyais pas. Maintenant que j’ai compris, je n’ai qu’une envie, celle de retourner à la première page et relire cette histoire, sous l’angle de la compréhension pour en lire tout ce qui était caché. En sachant la vérité et les événements de son passé, je comprends mieux pourquoi Luc Berger est devenu aussi complexe et je ne peux qu’être empathique de tout cela.
Parmi les autres personnages du village, j’ai adoré Calamity Sue (Suzanne), qui ne l’a pas eu facile dans son enfance et malgré toutes les rumeurs sur elle et les mauvais traitements, elle est une combattante. Elle ne se laisse pas faire. Il y a également Father Vince St-John «the Astronomer Priest» que je trouvais bien intéressant. Un curé qui boit pour oublier et qui ne fait pas vraiment le vœu de chasteté. Il est drôle à souhait.
Pour ajouter des moments de réflexion dans l’histoire, l’auteur a inséré à plusieurs endroits des citations parfois grandioses et d’autres plus loufoques. J’ai trouvé cela intéressant et parfois amusant à certains moments, comme un extrait de la cigale et la fourmi de La Fontaine, mais version modifiée…ou encore une citation de Coluche simple, mais efficace. Mais la plus troublante est celle de David Spiegel MD, qui est percutante et nous fait voir la grande complexité de notre cerveau. La toute dernière citation est une des plus pertinentes. «Et si la folie n’était qu’une révolte contre ce qui offense l’humanité » Jacques Ferron.
Voici donc un roman que je recommande chaudement. Il nous fait passer par toute une gamme d’émotions. Il y a des moments sombres, d’autres plus lumineux, mais surtout, il nous tient sur le qui-vive tout au long de l’histoire qui est extrêmement originale et audacieuse. Et son dénouement nous jette par terre au point d’avoir envie de recommencer notre lecture du début pour voir ce qu’on a manqué.
Miguel Ardan (pseudonyme) se considère comme un artiste d’instinct, comme un garçon spirituel, qui ne fait pas un feu roulant de bons mots, mais s’escrime plutôt en tirailleur. Dans les discussions, peu soucieux de la logique, rebelle au syllogisme, il porte des coups bien à lui. Véritable casseur de vitres, il lance en pleine poitrine des arguments ad hominem d’un effet sûr, et il aime à défendre du bec et des pattes les causes désespérées. Entre autres manies, il se proclame « un ignorant sublime », comme Shakespeare. C’est, en somme, un bohémien du pays des monts et merveilles, un aventureux, mais non pas aventurier, un casse-cou, un Phaéton menant à fond de train le char du Soleil, un Icare avec des ailes de rechange. Au bout de la folie est, selon lui, son tout premier roman.
Illustration : Ericka Sezille
Prix : 25.95$
Nombre de pages : 275 pages
Date de parution : 7 mars 2024
Éditions Alire : https://www.alire.com/