L’éternellement jeune et enthousiaste violoniste Alexandre Da Costa offrait, avec son quatuor à cordes, les bien connues Quatre Saisons de Vivaldi dans le cadre du Festival Stradivaria, une programmation de genres musicaux très diversifiés à l’envoûtante Église Saint-Viateur d’Outremont, mercredi soir le 25 juillet.
Son dynamisme enchanta près de trois cents mélomanes s’étant assemblés dans la nef incomparable de trésors sculptés et de peintures murales. La générosité du violoniste fut saluée de salves d’applaudissements entre chacun des douze mouvements composant les quatre concertos, un concerto ayant été composé pour décrire chaque saison. Chacune se trouve en fait accompagnée d’un programme en vers italiens, détail très souvent ignoré et j’en donnerai ici un exemple. Car il enrichit l’écoute.
Chaque saison imaginée en mots
La musique n’est pas un art mimétique mais voici ce que suggéreraient, pour le seul printemps, les mélodies et thèmes de l’oeuvre de Vivaldi en quelques mots évocateurs. Disons deux suggestions par mouvement décrivant le contenu de chacun des trois, marqués en séquence Allegro, Largo, Allegro, schéma répété à chaque saison.
Voici le printemps
A-chant joyeux des enfants, B-murmures des sources au souffle des zéphyrs, C-éclairs et tonnerres… D-l’orage passé, les oisillons reprennent leur chant, E-Alors sur le pré fleuri, au bruissement des frondaisons, le chevrier s’endort, veillé par son chien F-Au son de la musette pastorale, nymphes et bergers dansent pour fêter le printemps.
La nature, la musique, la danse, la poésie, la rêverie
La beauté des Quatre Saisons choyait donc le mélomane, mercredi soir, enfin pour disons celui ou celle qui se berçait dans cette église ravissante de sons, de couleurs et de parfums comme aurait ajouté Baudelaire.
Les vitraux et les peintures de Guido Nincheri
L’oeil et l’esprit jouissant des vitraux exquis de Guido Nincheri (1885-1973), cet artiste florentin échoué à Montréal et qui créa, entre autres, le décor ou l’ambiance générale est donc l’Église idéale pour l’ensemble de Da Costa. L’entreprise de ce jeune homme me fait penser à ce que Angèle Dubeau initia jadis comme invention divertissante pour valoriser son violon, voire même le mieux connu André Rieu. Les fresques murales du même artiste Nincheri, intitulées La vie contemplative, côté ouest puis sa contrepartie La vie active côté, est me permettaient aussi de m’évader, car on est pas tous portés aux interludes de musique populaire qu’on ajoutait ici entre les fameuses éternelles Saisons.
La voix de Yama Laurent
Chacun des groupes de trois mouvements composant une saison fut entrecoupé de deux chansons d’une artiste que je n’avais jusque-là pas connue, Yama Laurent, puisque je n’ai pas suivi le concours La Voix. Étant plutôt abonné aux grandes voix de l’opéra comme jadis Léontyne Price ou Kiri Te Kanawa chantant Gershwin, mes autres références étant Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan et Nina Simone puisque je suis un grand adepte du blues, je me suis tout de même adapté à cette offrande. J’ai agréablement reconnu une chanson de Luc Plamondon chantée jadis par Diane Dufresne Ne tuons pas la beauté du Monde, quelques airs célèbres dont celui de Luis Armstrong, What a Wonderful World, Stand by me et le grand succès de Johnny Halliday, Que je t’aime.
Une magnifique variation sur un air choyé de Beethoven
Mais parmi ces ajouts disparates du rock, du jazz, de la chanson populaire afin de ratisser bien large et plaire un peu à chacun, rien ne fut plus extraordinaire, à mon avis, sur le plan de l’originalité musicale que ce thème et variation sur l’air bien connu de Für Élise de Ludwig van Beethoven et qui vint clore une soirée sans entracte, gratuite et bénie d’une adorable fraîcheur, par surcroît.
Quelle bonne idée de se produire à l’Église des clercs de saint-Viateur rue Laurier! On s’y délecte à la contempler chaque fois que la musique offre un recueillement.