Le Musée d’art contemporain (MAC) inaugure ses installations temporaires à la Place Ville-Marie en présentant l’exposition Contagion de la terreur de Forensic Architecture avec la collaboration de Laura Poitras, cinéaste et documentariste. Une exposition ambitieuse qui lie art, activisme et enquête.
Le Collectif Forensic Architecture, basé à Londres mène des enquêtes depuis une dizaine d’années sur la violation des droits humains, l’injustice et la corruption dans le monde portant sur des événements d’actualité comme des actes de détention illégale et de torture, attaque chimique ou naufrage de migrants. En faisant appel à différentes méthodes de collecte de données et de technologies comme la modélisation 3D et la recréation de scènes de crimes, cette organisation a bâti une contre-expertise citoyenne unique en son genre.
Contagion Pegasus
Dans le contexte du confinement mondial, le collectif a porté son regard sur les victimes du logiciel malveillant Pegasus de la société NSO Group qui est utilisé pour surveiller les groupes militants, défenseurs des droits de la personne et journalistes. Développé par un fabricant israélien de cybersurveillance, ce logiciel a été vendu à plusieurs pays. L’exposition commence avec la présentation du documentaire Contagion de la terreur réalisé par Laura Poitras sur l’enquête du collectif. On y apprend comment le collectif a colligé ses preuves, notamment par les entrevues menées avec des journalistes et dissidents ayant été visés par le logiciel Pegasus. On peut également voir le travail de construction d’une matrice numérique servant à cartographier l’utilisation de ce logiciel.
Un des thèmes, Violence numérique: comment le NSO Group rend possible la terreur numérique, présenté dans cette exposition, expose également toutes les ramifications de ce logiciel par les témoignages de militants, journalistes et enquêteurs en utilisant les méthodes multidisciplinaires du collectif. À l’ère de la fausse nouvelle et de la cybersurveillance, le collectif Forensic Architecture veut changer le narratif en proposant une perspective politique différente sur des événements entraînant des violations des droits de la personne. Sa méthode d’enquête pourrait ressembler à une forme d’art politique engagé.
Violence numérique
L’enquête La disparition forcée des étudiants d’Ayotzinapa réalisé sur l’assassinat d’un groupe d’étudiants de l’école d’Ayotzinapa dans la ville d’Iguala, au Mexique en 2014, nous amène à constater l’ampleur de la cyber-surveillance qui mène à une violence répressive. La police locale avait mené une rafle meurtrière contre ces étudiants de connivence avec des organisations criminelles et la complicité des forces de sécurité mexicaines, incluant la police fédérale et l’armée. À la suite de cette opération, six étudiants sont morts, quarante ont été blessés et quarante trois ont disparu. De plus, un reportage datant de 2017 du Citizen Lab révèle que des membres de Centro Prodh et tous des collaborateurs de Forensic Architecture impliqués dans l’enquête sur les disparitions et les meurtres des étudiants auraient été surveillés à l’aide du logiciel Pegasus.
L’expérience immersive Violence numérique : la base de données spatiale nous entraine au cœur de l’univers de Pegasus, une plateforme numérique sans cesse en expansion qui cumule des milliers de données, des infections numériques et même des assauts physiques et plus encore. Les présentations visuelles mettent en valeur les outils d’enquête utilisés par le collectif Forensic Architecture. L’inquiétude ressentie tout au long de l’exposition est accentuée par l’environnement sonore créé par Brian Eno, musicien et producteur.
Le MAC travaille sur cette exposition depuis deux ans. La cybersurveillance est un enjeux social et politique très d’actualité qui est traité d’un point de vue artistique moderne à travers cette exposition.
L’exposition Contagion de la terreur se déroule du 1 décembre 2021 au 18 avril 2022.
Coût du billet 13 $.
Réservation de billet : https://macm.org/expositions/contamgion-de-la-terreur/
Photos: Manon Perron.