Françoise d’Eaubonne et l’écoféminisme fait partie de ces ouvrages marquants, qui au fil des pages, dessine dans un coin de notre esprit, ce que l’on pourrait appeler une révolte. L’essai de Caroline Goldblum nous présente donc Françoise d’Eaubonne qui est à l’origine du terme et du concept d’écoféminisme. Employé pour la première fois en 1974, il fait douloureusement écho au lien qui unit les femmes et l’environnement : le capitalisme. Une réflexion logique, empreinte de l’âme pacifiste des années 70, qui démontre de manière factuelle, les travers de notre monde, de nos pensées, de nos actes.
Le format d’essai donné à ce livre est parfaitement adapté pour présenter les théories de Madame d’Eaubonne. Il s’inscrit dans une démarche de recherche et fait ressortir les faits saillants de son travail, mais aussi du contexte qui était le sien lorsqu’elle a commencé à formuler ses idées. Révolutionnaire, précurseure et frondeuse, Madame d’Eaubonne a dû se frayer plus d’un chemin pour faire entendre sa voix.
Elle fait partie de ses irréductibles qui ont eu à cœur de faire avancer les causes sociales, en vers et contre tous. À la défense des droits des homosexuels, féministe engagée, elle prend également conscience de la problématique écologique au début des années 70. Dès lors, elle n’aura de cesse d’approfondir le concept, d’en retracer les origines et de théoriser de possibles avenues. Parmi elles, la décroissance démographique.
Si les femmes pouvaient disposer de leur corps comme elles l’entendent, si elles pouvaient avoir accès à des moyens de contraception, si elles n’étaient pas soumises au gourou patriarcal, elles pourraient décider en toute objectivité de donner ou non la vie. Ainsi, la surpopulation serait mieux contrôlée et pourrait restreindre l’exploitation des sols et des cours d’eau, l’une des conséquences de l’appauvrissement écologique, tel que nous le connaissons. Elle sera ainsi à la tête du mouvement « grève des ventres » de 1974. Mais si l’ouvrage stipule que l’accueil des travaux de Madame d’Eaubonne a été plutôt cordial en Amérique du Nord, il n’en est pas de même pour la France, qui a crié à la vaste blague.
Des théories, des actes, des manifestes autant d’éléments qui, telles des tendances mode, renaissent de leurs cendres depuis quelques années. Et cela est particulièrement troublant : tant de faits ont été prouvés au cours des décennies, et pourtant rien ne semble vouloir avancer.
Aux travaux de recherche, d’observation, aux discussions, s’ajoute également une notion plus psychologique et spirituelle. Un courant de pensée qui prend ses origines dans de grands écrits – Simone de Beauvoir pour ne citer qu’elle – mais qui a donné naissance à des actes concrets et aboutis.
Le mouvement s’est essoufflé dans les années 90, mais connait un regain d’intérêt, qui place de nouveau en son centre, le droit de tout corps à jouir de sa condition de vivant.
Et face à la crise environnementale, il est important de mesurer tout ce que comprend l’écoféminisme et de l’inscrire au présent.
Françoise d’Eaubonne et l’écoféminisme – Caroline Goldblum
Éditions : Passager clandestin (Le)
Sujet : Sociologie des femmes / féminisme
122 pages