Nicole Martin revit sur scène grâce à des moyens technologiques d’envergure et une imposante équipe entourant les Marie-Élaine Thibert, Marie Michèle Desrosiers et Annie Blanchard, réunies pour le spectacle : Nicole – Les chansons d’une vie. En plus des musiciens en chair et en os, on y entend une section de cordes et une autre de cuivres qui apparaissent virtuellement sur un écran géant. Durant toute la soirée, on est fasciné par des dizaines de photos qui témoignent de la longue carrière de cette interprète majeure de la chanson québécoise. À tout cela vient s’ajouter un numéro bouleversant pour la chanson Il était une fois des gens heureux ! Compte-rendu d’une soirée éblouissante !
Elle rêvait grand la Nicole qui nous a quitté bien trop tôt, le 19 février 2019, à l’âge de 69 ans. Pas étonnant que la première chanson de la soirée évoque le feu qui brûlait en elle : «La roue tourne côté lumière / J’ai besoin de m’y aveugler / Le soleil brûle mes paupières / Incendie annonçant l’été» (Bonsoir tristesse).
Durant un peu plus de deux heures incluant un entracte, on réalise qu’on a gardé en mémoire presque tous ses nombreux succès : Je t’oublierai, Une photo de toi, Tes yeux, Oui paraît-il, etc.
Il y a eu aussi la période où elle a changé son nom pour Zerra, dans les années 1970, après avoir rencontré Tony Roman. Avec ses allures de chasseresse psychédélique très maquillée, elle a alors chanté entre autres du Janis Joplin, à l’Autostade de Montréal, en première partie, notamment, des groupes Procol Harum et Jethro Tull. De plus, Zerra est devenue, avec Robert Charlebois, la seule artiste québécoise à monter sur la scène du mythique Esquire Show Bar de Montréal.
Quelques années plus tard, Nicole tombe amoureuse du chanteur Jimmy Bond avec qui elle enregistre l’album Les coeurs n’ont pas de fenêtres qui connaît un important succès, entre autres, grâce à sa chanson-titre, sans oublier On est fait pour vivre ensemble. En plus de reprendre ces refrains en medley, Blanchard, Desrosiers et Thibert se lancent avec une complicité évidente dans le joyeux rock’n’roll de Jimmy, Jimmy.
Acadienne, Annie Blanchard, nous rappelle que la chanson Les Aboiteaux de son compatriote Calixte Duguay avait été gravée sur disque par Nicole Martin, en 1976. Pierre Létourneau, Angelo Finaldi, Francis Lai, Jean Musy, Eddy Marnay, lui ont aussi composé des pièces à sa mesure. Nicole Martin abordait la chanson avec une certaine «théâtralité», fait valoir Marie Michèle Desrosiers sur un ton admiratif.
La classe
Tout le monde est tiré à quatre épingles sur ce plateau chic ! Les musiciens et choristes dirigés par Charles Barbeau sont l’incarnation même de ce qu’on appelle des pros ! Tout est joué avec précision ! Quant à la sonorisation, elle est devenue limpide après une courte période de mise au point.
Bien sûr, il y a un escalier. Il est même éclairé de l’intérieur. Les marches changent parfois de couleur un peu comme à l’époque des pistes de danse à la Saturday night fever. D’ailleurs une énorme boule disco virtuelle fait son apparition pour Rien n’est impossible et son rythme à vous enflammer le bassin ! La mise en scène de Pierre Séguin ne laisse aucun temps mort.
Laisse-moi partir, Cet enfant de toi, Quand on s’en va le coeur oublie, Tout seul au monde, etc. Toutes sont reprises dans des arrangements très proches des versions originales.
Pour ce qui est des photos, non seulement elles couvrent les différentes époques de la vie de la disparue, mais en plus elles sont utilisées avec doigté. Par exemple, à certains moments on «zoome» progressivement sur le visage de Nicole Martin. Plus tard, presque toutes les photos utilisées durant le spectacle réapparaissent progressivement sur l’écran où l’on en compte une cinquantaine (!), comme un résumé de la vie de la star en une seule page. On sent que son mari, Lee Abbott, a veillé amoureusement sur ce projet.
La technologie et l’émotion
Marie-Élaine Thibert qui a elle-même enregistré Il était une fois des gens heureux, semble particulièrement à l’aise dans ce morceau qui a d’abord été popularisé par Nicole Martin sur la bande sonore du film Les Plouffe. Déjà ému à l’écoute de cette grande chanson de Stéphane Venne, le public retient son souffle en voyant apparaître Nicole Martin elle-même à l’écran !
Vêtue de noir et toujours en maîtrise de son art vers la fin de sa vie, la dame est magistrale et le texte de la chanson prend maintenant une toute autre résonance : «On fait toute la vie semblant qu’on va durer toujours…» Plus grande que nature, elle a des allures de prophétesse : «Il ne faut pas chercher à savoir où s’en va le temps / Il s’en va pareil aux glaces dans le Saint-Laurent.»
Nicole – Les chansons d’une vie n’est pas seulement un hommage. En plus du talent des artistes réunis, Nicole Martin revit grâce à un usage judicieux de la technologie. Ce spectacle mérite presque la note parfaite !
Nicole – Les chansons d’une vie
«Première tapis rouge» au Théâtre Maisonneuve, le 25 mai
Suivront deux représentations à Québec, à la salle Albert-Rousseau, les 7 et 8 juin
Détails de la tournée