La Maison Symphonique a connu un autre moment de splendeur musicale grâce au somptueux ensemble des Violons du Roy accompagnant le riche choeur de La Chapelle de Québec ayant invité le soprano Anna Lucia Richter incarnant l’Ange Gabriel puis Ève, le baryton Thomas Bauer posant en Ange Raphaël puis Adam et enfin le ténor Allan Clayton incarnant l’Ange Uriel.
C’est le jeune et dynamique Jonathan Cohen qui dirigeait les musiciens et chanteurs. On sait que La Création est un chef-d’oeuvre vocal et orchestral incontestable qui a exigé deux ans de labeur acharné (jusqu’en avril 1798) au grand maître viennois jadis contemporain de Mozart (1756-1791) et Beethoven. L’oeuvre rarement produite et entendue est inspirée, comme l’indique son titre, de la Genèse biblique et elle fait songer au Paradise Lost de Milton voire même à tous les paradis naturels désormais détruits ou anéantis à jamais depuis les idylliques jours où tant d’êtres vivants séjournaient paisiblement ensemble, loin de la guerre, sur la planète Terre.
Les trois archanges mis en scène relatent les sept jours de la Création selon la splendeur de la conception chrétienne de l’apparition de la vie terrestre. C’est la gloire de tout l’Occident et de toute l’Église romaine en notre civilisation bimillénaire qu’on peut y lire, y entendre dans cette partition de quatre-vingt-dix minutes. La beauté des voix des choristes québécois m’est apparue rassérénante et idéale. Rarement connaît-on un tel ravissement spontané dans ces oeuvres d’apparence gigantesque (tel est aussi le Requiem allemand de Brahms).
Le décorum avec lequel les musiciens de Jonathan Cohen sont entrés en scène par deux fois sous les applaudissements nourris, lors des deux entrées solennelles, l’élégance naturelle du chef, l’adresse des virtuoses dont les voix expérimentées nous ont nourri de joies religieuses, enfin je ne trouve que le mot régalien qui ne soit pas trop fort car il n’y a de régal que ce qui s’adresse aux empereurs et aux rois. Nous en fûmes tous un peu, du parterre aux loges, transportés vers je ne sais quel paradis puisque la salle remplie d’invités et de connaisseurs entendirent les solistes jusqu’à cette fugue grandiose, puis au-delà du Jardin et du Paradis terrestre : chacun s’est senti animé d’un sentiment de foi profonde exprimée par des voix d’une très grande pureté, une justesse limpide quand bien même de difficiles intervalles et vocalises difficiles étaient exigés (disons le plus souvent de Gabriel et d’Ève). En somme, les airs des solistes, les récitatifs et toutes les parties dévolues au choeur furent absolument toutes réussies. Quelle richesse sonore réverbérait dans la Maison Symphonique en ce dimanche de lendemain de Nuit Blanche pour une génération beaucoup plus jeune évidemment absente de cet événement musical de premier ordre! Quelle inspirante Création!
Dimanche 3 mars 2019, 19h30, Maison Symphonique. Prochain rendez-vous des Violons du Roy : la Messe en si mineur de Bach à la Maison Symphonique le 11 mai à 19h30 avec la Chapelle de Québec.