Maneige, l’un des premiers groupes québécois à jouer du rock progressif s’apprête à remonter sur scène, après presque 40 ans d’absence. Formé en 1972, cet ensemble a enregistré sept albums en studio dont Libre-Service demeure l’un des plus connus. En plus d’avoir joué en première partie du groupe britannique de jazz fusion Soft Machine, la formation québécoise a effectué une tournée à travers le Canada, quelques années avant d’offrir son dernier spectacle au Festival d’été de Québec, en 1984. Puis, après des décennies de silence, les astres s’alignent pour que Maneige rebranche ses amplis. Entrevue avec l’un des piliers du groupe.
L’audace récompensée
Maneige est resté tatoué sur le coeur du flûtiste et saxophoniste Alain Bergeron, cofondateur du groupe. Même s’il a passé la majeure partie de sa vie à enseigner la musique, l’homme n’a rien oublié de la belle époque où lui et ses complices entraînaient audacieusement les Québécois sur des sentiers musicaux peu explorés chez nous.
«Il est vrai que notre musique est difficile à catégoriser. On nous a mis dans le prog, le jazz-rock, la musique alternative, etc. En fait, ce qui résume notre démarche artistique, c’est l’exploration.
Notre principale influence a d’ailleurs été L’Infonie dont le cofondateur Raôul Duguay a collaboré avec Maneige.
Toute cette époque était empreinte d’une mouvance exploratoire. On le réalisait, entre autres, dans nos contacts avec les gars d’Octobre et d’Offenbach. De notre côté, nous avons composé des pièces sans paroles mais qui racontent des histoires.»
À ce sujet, Michel Rivard (Beau Dommage), a ainsi résumé ses impressions dans la pochette de l’album Maneige – Live Montréal – 1974/1975 : «Il y a dans la musique de Maneige… des images nouvelles de choses que l’on connaît… La musique de Maneige est imprévisible et… nous fait rire, crier ou pleurer.»
De l’avis général, le groupe a atteint son apogée avec son quatrième album, Libre-Service : «Nous étions probablement au meilleur de notre forme. Nos pièces étaient plus courtes, ce qui facilitait leur diffusion à la radio. En plus, nous l’avons enregistré au Studio St-Charles avec l’excellent Claude Demers à la réalisation.»
Dans la foulée de ce succès, Maneige est parti en tournée canadienne d’un océan à l’autre, en 1978. L’année suivante, Bergeron et sa bande débarquaient au «Cinéma Outremont». Leur musique associée à l’avant-garde avait alors atteint un niveau de popularité sans précédent. «Je m’en souviens, la salle était bien remplie aux deux niveaux. Robert Charlebois était même dans l’assistance !»
L’esprit de Maneige
Alors pourquoi Maneige s’est-il tu ? «Rappelons que dès le début, tous les membres du groupe participaient aux compositions. Puis, au tournant des années 1980, certains ont quitté le navire. Nous les avons remplacé par de très bons musiciens, mais ce n’était plus tout à fait l’esprit de Maneige.» On se souviendra, en effet, que le pianiste Claude «Mego» Lemay et le guitariste Michel Lefrançois se sont joints au groupe pour son tout dernier album intitulé Images.
Maneige renaît à Repentigny
Depuis que l’enseignant est à la retraite, il a repris goût à répéter avec ses amis de Maneige. De fil en aiguille, ils ont été invités à présenter deux spectacles à Première Scène Mont-Tremblant, l’an dernier. «Ça a été compliqué à cause de la pandémie : deux soirées où la salle n’était qu’à moitié remplie.»
La formation a aussi présenté un spectacle sans public pour tester les équipements du tout nouveau Théâtre Alphonse-Desjardins de Repentigny. Ça s’est bien passé et on a invité le groupe à s’y produire, devant public cette fois, en octobre 2022. Le spectacle sera présenté en formule cabaret.
On y retrouvera Alain Bergeron (flûte, saxophone), Yves Léonard (basse), Gilles Schetagne (batterie), Denis Lapierre (guitare,1975-1982) et Paul Picard (percussions 1973-1984). Le claviériste Vincent Langlois ne sera pas de la partie pour cause d’ennuis de santé. Il a été remplacé par Jean-François De Bellefeuille. On a aussi invité le vibraphoniste Jean Vanasse.
Pour ce retour sur scène, Maneige interprétera principalement des titres du disque Libre-Service (1978), ainsi que des pièces tirées des albums Ni vent, ni nouvelle (1977), Montréal 6 AM (1980) et Images (1983).
Maneige pourrait-il ensuite partir en tournée ? Enregistrer d’autres disques ? «Rien n’est impossible ! On va se laisser guider par la réaction du public.» À suivre…
Maneige, les 7 et 8 octobre 2022, au Théâtre Alphonse-Desjardins de Repentigny