L’exposition immersive «transformé» qui ouvre ses portes, cette semaine, à Montréal, ne manque pas d’originalité ! Après Van Gogh – Distorsion, voilà que l’équipe OASIS immersion, installée au Palais des Congrès, nous amène dans une toute autre direction.
Cette fois-ci, il ne s’agit pas de revisiter les tableaux de peintres célèbres par le biais des nouvelles technologies. On entraîne plutôt le visiteur dans un parcours déambulatoire inusité, axé sur des histoires vraies, liées au deuil, aux questions de santé mentale, etc. Huit oeuvres, initialement conçues pour des casques de réalité virtuelle, ont été adaptées et parfois réinventées pour l’immersion façon OASIS, permettant de passer d’une expérience individuelle à une expérience collective. Les voix de Marion Cotillard et Emmanuel Schwartz sont mises à contribution. Explications.
Le deuil
Difficile de rester insensible devant l’intensité de Vestige, où la voix de Marion Cotillard nous plonge dans l’univers d’une femme inconsolable après la mort de son mari. Ce documentaire VR (virtual reality) d’une douzaine de minutes, réalisé en 2018 par Aaron Bradbury, a été couronné «Meilleure oeuvre immersive» au Festival international de Genève.
Des images parfois tordues et embrouillées évoquent l’esprit de Lisa, meurtrie par la disparition de son amoureux. Malgré sa peine, une sorte de consolation se dessine. La veuve en arrive à la conclusion que le deuil est le meilleur des professeurs sur un sujet difficile que les humains sont si réticents à envisager : la mort.
Le spectateur se retrouve donc en compagnie d’inconnus qui, ensemble, s’émeuvent devant l’évocation de la déchirante perte d’un être cher. Le virtuel génère ainsi tout un contraste avec la réalité, puisqu’on a si souvent tendance à minimiser, voire, ignorer les deuils qui affectent nos proches.
L’expérience est saisissante au niveau visuel et sonore ! La musique originale de Starkey est percutante, quoiqu’elle couvre parfois un peu trop les propos de la narratrice qui s’exprime en français. Le texte de la traduction anglaise défile sur les murs de la salle.
Un mystère grand comme Tokyo
Dans un tout autre registre, Tokyo Light Odissey nous entraîne dans la gigantesque capitale japonaise. Les lumières des gratte-ciel, les phares des voitures, etc., apparaissent comme autant de fragments de la ville qui flottent comme de la poussière d’étoile dans la nuit et qu’on admire confortablement assis… sur une chaise berçante!
Dans ce cas-ci, il n’y a pas de narration. À chacun d’interpréter ces mystérieuses images devant lesquelles on se sent si petit. Solitude ? Esseulement ? Pied de nez des humains aux maîtres des cieux ? Cette odyssée lumineuse de Tokyo, créée en 2016, a reçu un prix d’excellence Webby, décerné par l’Académie internationale des arts et des sciences numériques. D’ailleurs, pratiquement toutes les oeuvres réunies dans transformé ont obtenu diverses distinctions.
Gamme d’émotions
On the morning you Wake raconte les 38 minutes de terreur vécues par les Hawaïens, alors qu’on leur annonçait qu’un missile nucléaire allait les frapper.
Container est inspirée du naufrage d’un navire d’esclaves au large des côtes du Cap, en Afrique du Sud.
Ferenj (étranger) met en lumière le défi de ceux qui, de par leurs origines, doivent composer avec plusieurs cultures. Cette oeuvre de l’artiste américano-éthiopienne Ainslee Alem Robson nous fait voyager de Cleveland à Addis-Abeba, à travers des fragments numériques qui s’apparentent à une forme de pointillisme. Cette création a reçu le Prix spécial du jury du NewImages, un festival français de la création numérique et des mondes virtuels.
Goliath
À travers la narration d’Emmanuel Schwartz, Goliath aborde le sujet tabou de la schizophrénie et des troubles psychiatriques, tout en évoquant l’isolement vécu dans les milieux institutionnels. Goliath, c’est la société qui demeure méfiante et fermée face aux personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale, souligne le narrateur.
Traduite de l’anglais vers le français québécois, cette expérience fait appel aux codes visuels des jeux vidéo pour illustrer la conversion d’une solitude en un réconfort trouvé auprès d’une communauté de «gamers» en ligne. Cette oeuvre de Barry Gene Murphy a décroché le Grand prix du Jury VR, à la 78ème édition du Festival du Film de Venise.
En résumé, transformé est un voyage futuriste captivant ! En plongeant au cœur du vécu des humains, on va de surprise en émerveillement ! Il faut prévoir environ 80 minutes pour en profiter pleinement. Cela dit, avant tout, les visiteurs ont intérêt à lire les résumés des expériences immersives offertes; des textes sont affichés à l’entrée de chacune des trois salles de l’exposition.
transformé : expérience immersive déambulatoire inspirée de faits vécus
Au Palais des congrès de Montréal
À compter du 19 janvier
*Photos fournies par OASIS immersion