Si la perfection n’existe pas, la France s’en est joliment approchée samedi dernier. La chorégraphie poétique annoncée a donné place à de superbes tableaux (et des photos peu communes ! que vous pouvez voir ici). Il n’y a eu que très peu d’erreurs d’exécution, un exploit considérant la complexité de la conception, les couleurs bien vives, la construction des différents segments était en général savoureuse, la synchro top, et la bande sonore installait bien l’ambiance. Cette dernière aurait pu bénéficier d’un peu plus d’amour, mais c’est très peu de critique et la France devrait gagner haut la main cette 38e édition de l’International des Feux Loto-Québec ! Revoyez cette excellente prestation ici :
Quant aux Jupiter d’argent et de bronze, la course est plus serrée. Rappelons que le jury est composé de 19 personnes, hommes, femmes, ou autres, de 18 ans à pas d’âge, tous avec des goûts qui leur sont propres, car si certains critères sont plus objectifs, d’autres relèvent d’un goût plus personnel. Voici les critères auxquels le jury a dû porter attention tout au long de la saison :
- Pièces pyrotechniques (20 points). Les jurés évalueront ici la luminosité, l’éclosion, la diversité, la nouveauté, la beauté et la complexité des artifices et figures déployés
- La synchronisation (10 points). Ce critère consiste à observer la qualité, la précision, la constance de la synchronisation, qu’elle soit visuelle ou sonore
- La bande sonore (15 points). Il ne s’agit pas ici d’évaluer si les chansons nous plaisent ou non, mais plutôt de voir si elles sont bien en harmonie avec le thème annoncé, si les enchaînements sont fluides, sa complexité et si elle vient amplifier la conception artistique
- La conception technique (25 points). Il faut vérifier ici si le pays en compétition a bien utilisé l’espace qui lui est alloué, autant au sol que dans les airs, la quantité de produits, les innovations, la constance
- La conception pyromusicale (30 points). C’est surtout ici que tout peut se jouer, car ce dernier critère réfère à l’union parfaite des précédents, à l’originalité de la conception entière, à la symbiose entre la pyrotechnie et la musique, bref, à l’appréciation générale. Le feu d’artifice peut avoir été très fort techniquement, mais s’il nous a laissé froid, la firme peut perdre beaucoup de points ici. Après tout, on recherche à Montréal, les spectacles qui auront présenté des qualités artistiques élevées.
Ainsi, le Canada et l’Italie ont de fortes chances de se classer, mais le Mexique pourrait causer la surprise ayant été très fort sur ce dernier critère, très payant. Alors ? Qu’en ont décidé ces 19 jurés ? La réponse viendra ce soir autour de 21:30 EDT. Vous pourrez suivre la cérémonie en direct ici. Quant à la meilleure bande-son, attribuée par l’organisation, l’Italie est sûrement en bonne position; et quant au prix environnemental, aussi attribué par l’organisation, impossible d’en faire la prédiction, puisque les processus de fabrication sont inconnus du public et restent à l’interne.
Place à la Fête !
Et quand les gagnants auront été nommés, nous aurons droit à un Hommage à Coldplay ! Depuis 2011, le feu de clôture s’inscrit dans une thématique ‘Finale des Étoiles’ et rend hommage à un artiste ou un groupe. Le directeur technique de la Ronde Paul Csukassy, est derrière ces choix chaque année. Alors, Paul, pourquoi Coldplay ? « Je trouve que Coldplay avait sa place, c’est une musique très vaporeuse, il y a autant de choses rapides, que de musiques plus planantes. Pour des feux, il y a rien de mieux que de la musique comme ça ! Coldplay a quand même un catalogue assez important. Je recherche toujours des artistes qui sont dans le paysage musical depuis au moins 20 ans. Je ne suis pas un grand fan de Coldplay, mais j’aime beaucoup leur musique. Et encore plus maintenant ! ». Il poursuit : « Ce n’est pas la musique sur laquelle on met des feux d’artifice en arrière. La pièce maîtresse, c’est la pyrotechnie, alors il faut trouver de la musique qui se marie bien avec les feux, une musique viendra accompagner, et non l’inverse. En ce sens, Coldplay était tout indiqué pour soutenir ce dernier spectacle pyrotechnique de 30 minutes ».
Tous les albums de Coldplay examinés
Pendant deux mois, avec ses écouteurs, Paul a passé en revue la discographie complète de Coldplay, a fait une présélection d’une trentaine de chansons, a finalement réduit cette sélection de moitié et il a joué avec l’ordre des différentes pièces retenues afin d’avoir un beau mariage final. Aidé son fidèle acolyte au studio Piccolo à Montréal, les transitions ont été peaufinées afin d’arriver à une musique complètement coulante. Avec un horaire de fou, ce n’est qu’à la fin juin que cette musique fût envoyée à la firme italo-américaine Rozzi Famous Fireworks, qui en avait par-dessus la tête avec le 4 juillet. Toutefois, ce « retard » comparativement aux habitudes des années précédentes, aura permis d’ajouter, en pénultième position de la trame sonore, un single que Coldplay vient tout juste de sortir. Sur un album… à paraître à l’automne !!! Un bel ajout de dernière minute.
Concernant le design ? A-t-il son mot à dire ? « Non, je ne veux embarquer dans la partie des designers. Je peux certes leur suggérer d’avoir par exemple des queues de cheval à tel moment ou autres effets spécifiques à un autre moment, mais en général, j’aime bien les laisser aller. Je veux qu’ils soient libres. J’aime comment Rozzi dessine leurs spectacles, et en général c’est toujours très bon. Je n’ai rien vu de simulation ou autre, je serai aussi surpris que vous jeudi soir ! Les simulations sont souvent décevantes au final. C’est beaucoup plus humain – moins technique – de le voir en vrai » .
Rozzi : Une affaire de famille
Sont sur les rampes cette semaine les 3 sœurs, Paula, Angela, Nancy, et leur frère Joe – sans oublier le fils de Paula, Michael Lutz co-designer du spectacle Hommage à Coldplay avec son oncle Joe. Ils n’ont pas souvent la chance d’être tous ensemble sur le même spectacle, alors c’est la fête familiale cette semaine !
Tout comme Paul, Michael n’est pas le fan #1 du groupe britannique, mais il aime bien leur musique. « Oui, j’aime beaucoup Coldplay, j’utilise plusieurs de leurs chansons dans mes spectacles. Par exemple, la première Higher power, aussi A sky full of stars évidemment, Viva la vida, Paradise… oui, Coldplay est très bon pour les feux d’artifice ». Mentionnant la qualité du travail de Paul Csukassy avec la musique, il affirme avoir pris une semaine complète – une fois la folie du 4 juillet passée – pour faire la conception avec son oncle. Rozzi est responsable d’ une centaine de spectacles aux États-Unis pour la fête nationale ! S’il s’attribue à tout le moins la conception de l’ouverture, (il adore cette chanson !), il mentionne que c’est Joe qui a fait la clôture « Il est meilleur que moi ! J’aime mieux faire les ouvertures, je pense être bon là-dedans, et lui le bouquet final, et il le fait très bien ! Il est 100% italien, je ne le suis qu’à 50% » dit-il en riant. On connaît les finales italiennes… Pour le reste ils se sont séparés les tableaux ici et là, mais aimant beaucoup Yellow, Michael se l’est gardée. Par chance, il est assez facile de voyager leur camion, donc en quelques jours à peine, tout est ici a Montréal. Comme ils sont les principaux importateurs des produits italiens Panzera aux États-Unis, ils ont déjà tout en inventaire à Cincinnati. On est ailleurs comparativement au pays en compétition…
Souci d’écoresponsabilité
Dommage que ce dernier feu ne puisse être en lice pour le prix environnemental, car Panzera remporterait sûrement la palme. Depuis plusieurs années, les chimistes de Panzera s’affairent à développer des produits plus écoresponsables, et s’il y a une chose que la pandémie a eu de bon, c’est qu’elle leur a permis de faire de grands bons en la matière. Elle a toute un ligne de production sans perchlorate, elle a pratiquement éliminé tous les plastiques, ou ce qu’il en reste est bio-dégradable, fabriqué avec les parties non-comestibles du riz. C’est majeur comme avancé !
É tutto il resto !
Au nombre des spécifications techniques de ce soir, il y aura 4200 mises à feu, environ 1200 monocoups, une douzaine de grosses bombes, dont quelques japonaises ! Mis à part la ligne choinoise Ikon, tout le reste, c’est Panzera !
Sans l’ombre d’un doute, tel que le chantera Chris Martin à la toute fin du spectacle, ce soir, ce sera A sky full of staaaars ! Ça finira en beauté cette 38e édition de l’International des Feux Loto-Québec !
Trame sonore du spectacle Hommage à Coldplay, des firmes Rozzi Famous Fireworks et Panzera SAS :