Sébastien David, metteur en scène, a chaussé de grandes bottes en s’attaquant à La Société des poètes disparus, classique parmi les classiques. Nous avons tous encore en tête le génial Robin Williams en professeur inspiré et inspirant dans le film de 1989, Le Cercle des poètes disparus. La comparaison était donc inévitable. Mais Monsieur David n’est pas tombé dans le piège : il s’est approprié l’œuvre en respectant son essence.
Par ses méthodes anticonformistes, Keating, professeur excentrique, passionné et militant encourage ses étudiants à libérer leurs esprits et à sortir des carcans imposés par leurs parents et la prestigieuse Welton Academy. Grâce aux mots de poètes dissidents qui ont bouleversé leur époque, ces jeunes recréeront la « Société des poètes disparus » à laquelle Keating a lui-même appartenu dans son jeune temps.
Comme le dirait si bien Keating : « Il ne faut pas considérer une chose deux fois sous le même angle ». Cette phrase, Sébastien David semble en avoir fait son mantra pour adapter La Société des poètes disparus. Une réappropriation dans le respect de l’œuvre, qui offre une tribune plus large aux étudiants. Autant le film reposait entièrement – il faut bien le dire – sur le regretté Robin Williams, autant la pièce prend délibérément le parti de se concentrer sur les étudiants.
Patrice Dubois endosse parfaitement le costume du professeur Keating, personnage qui prend de plus en plus de recul au fur et à mesure de la pièce. Ainsi, la chimie entre ces gamins explose littéralement. Tous les comédiens sont justes et font raisonner le texte – légèrement adapté – haut et fort. Impossible de ne pas embarquer dans leur douce libération. Ces étudiants paumés, qui oscillent entre excellence et rébellion, passent de chenille à papillon au travers de leurs découvertes littéraires et de leur ouverture au monde. Une métamorphose qui ne fera pas sans sacrifices…
Alors que certains ont tendance à abuser de scénographie superflue afin de marquer de leur style un texte, Sébastien David est resté subtil. Une mise en scène simple, jouant sur les lumières, sur les ombres et sur des ralentis très efficaces ; des émotions à fleur de peau qui nous atteignent à tout coup.
Bien sûr, l’ombre du film plane toujours et on se prend à reconnaître ces répliques, ces attitudes qui nous ont tant donné envie de tout foutre en l’aire et de vivre… sa vie, enfin?
La scène finale – mythique – est un concentré d’émotions pour le spectateur : larmes qui pointent, frissons qui s’assument… on la connaît, on l’attendait, mais elle nous frappe de plein fouet quand même.
Un texte à découvrir, un metteur en scène à suivre, un discours à faire raisonner… N’oublions jamais les revendications de nos jeunes années.
Crédit photo : Gunther Gumper
Durée de la pièce : 1h45 sans entracte
La Société des poètes disparus : jusqu’au 26 avril au Théâtre Denise-Pelletier.
TEXTE Tom Schulman
METTEUR EN SCÈNE Sébastien David
DISTRIBUTION Mustapha Aramis, Jean-François Casabonne, Patrice Dubois, Gérald Gagnon, Maxime Genois, Simon Landry-Désy, Étienne Lou, Anglesh Major, Alice Moreault et Émile Schneider