Il y a des classiques dont les reprises ne peuvent qu’être comparées à une adaptation particulièrement réussie. C’est exactement la situation dans la laquelle se trouve Vol au-dessus d’un nid de coucou, 42 ans après la sortie du film aux 5 oscars, avec Jack Nicholson dans le rôle principal.
Les souliers étaient en effet très grand à chausser et même s’il serait préférable de ne pas tomber dans le piège en se remémorant le film, on ne peut s’en empêcher, parce que grand acteur, réalisateur au sommet de son art, personnages secondaires solides, sous-textes engagés… je vous laisse poursuivre.
L’histoire commence par l’internement de McMurphy, délinquant sexuel présumé, qui choisit de plaider la folie, pour échapper à la prison. De jour en jour, il va s’attacher aux patients qui hantent les couloirs de l’hôpital et se révolter contre les traitements inhumains et le manque de considération qui font tristement partie de leur quotidien. McMurphy (Mathieu Quesnel) tente une opération de séduction auprès de Ratched (Julie Lebreton) pour arriver à ses fins, mais finit par se rendre compte du danger qu’elle représente et commence alors entre eux, une lutte de pouvoirs, une guerre psychologique – dans un hôpital psychiatrique, quelle belle ironie ! – qui se terminera de manière tragique.
Concernant ce dernier point, je reste un peu sur ma faim : j’aurais souhaité une interprétation plus incisive, plus hargneuse de Julie Lebreton ; certes, elle se doit de rester intègre et en contrôle mais au final, n’est-ce pas son personnage le plus fou ? Obnubilée par son travail, il représente plus que son gagne-pain et tout échec est pris de manière extrêmement personnel : elle ne peut échouer. Ce malaise ressort difficilement et il semble que l’on perçoive très peu tous les stratagèmes sournois que Ratched utilise pour rabaisser McMurphy à son état primaire de psychopathe sans raison. Quant à Mathieu Quesnel, il se démène comme un beau diable et parvient à frôler le tempérament jovial et furieux caractéristique de McMurphy, sans toutefois l’atteindre.
Les personnages, injustement qualifiés de secondaires, à savoir tous les patients de l’hôpital, sont une belle surprise car ils apportent une justesse et une crédibilité très appréciées; en effet, il ne doit pas être facile de simuler une maladie mentale, sans tomber dans l’exagération malsaine. Bien sûr, le chef indien est celui qui nous interpelle le plus, car son charisme et son implication dans le final de la pièce, corresponde en tout point au souvenir que nous en avions.
Que doit-on finalement penser de cette adaptation ? Elle est juste mais ne parvient pas à nous perturber. Son metteur en scène Michel Monty est resté très en surface d’une atmosphère qui aurait dû être plus oppressante pour instaurer petit à petit le drame. Enfin, lorsque je dis que nous n’avons pas été perturbés, ce n’est pas totalement vrai : l’insoutenable crédibilité de la dernière confrontation physique entre Ratched et McMurphy – qui me fait encore frissonner – offre un final très poignant… mais qui malheureusement, arrive trop tard.
Vol au-dessus d’un nid de coucou est présenté jusqu’au 23 avril, au Théâtre du Rideau Vert.
Metteur en scène MICHEL MONTY
Distribution JULIE LEBRETON, MATHIEU QUESNEL, SYLVIO ARCHAMBAULT, ANNE-MARIE BINETTE, CATHERINE CHABOT, PHILIPPE DAVID, STEPHANE DEMERS, JACQUES GIRARD, JEAN-FRANCOIS HUPE, RENAUD LACELLE-BOURDON, JUSTIN LARAMEE, BENOIT MAUFFETTE, JACQUES NEWASHISH, FREDERICK TREMBLAY, GILBERT TURP
Durée du spectacle
1 h 40 sans entracte