Malgré certaines appréhensions, le pianiste russe Daniil Trifonov a pu donner son concert avec l’OSM, ce mercredi et une deuxième représentation est prévue, ce soir (21 avril). La présence de ce visiteur, venu interpréter principalement des oeuvres de compositeurs russes, a toutefois été dénoncée par quelques manifestants arborant des drapeaux ukrainiens.
Dès 18 heures, un petit groupe de manifestants commençait à prendre forme aux abords de l’entrée de la Maison symphonique, sur le trottoir de la rue Saint-Urbain. Par la suite, certains ont monté un étage jusqu’à l’esplanade pour se faire voir des spectateurs dans le foyer. Certains brandissaient des pancartes où on pouvait lire, entre autres, «La culture russe est une occupation mentale». D’autres montraient des photos de victimes de la guerre en Ukraine.
Les agents de sécurité étaient bien visibles dans la Maison symphonique, alors que différents représentants de la communauté ukrainienne ont dénoncé, depuis plusieurs jours, le maintien de ce concert. Ils estiment que ce n’est pas un bon moment pour inviter des représentants de la culture russe au Canada. D’autres reprochent à monsieur Trifonov, qui vit maintenant principalement aux États-Unis, de ne pas avoir dénoncé clairement l’invasion de l’Ukraine.
De son côté, la direction de l’Orchestre symphonique de Montréal dit avoir pris sa décision après avoir été vivement critiquée lors de l’annulation du concert du jeune pianiste russe Alexander Malofeev, le mois dernier. Cette fois-ci, on a refusé de céder à la pression et de changer le programme de la soirée intitulée Concertos pour piano et poèmes symphoniques. On a tout de même changé le titre du concert qui devait être «Concertos russes et poèmes symphoniques français».
La directrice de la programmation, Marianne Perron, a pris la parole pour préciser le sens de ce concert et du choix des oeuvres au programme auquel on a ajouté la pièce Prière pour l’Ukraine du compositeur Valentin Silvestrov.
Ovation debout pour Trifonov
Cette dernière a été enchaînée au Concerto pour piano et orchestre à cordes du Russe Alfred Schnittke, sous la direction de Rafael Payare. L’oeuvre passe du calme à l’agitation extrême. Ébloui devant la virtuosité du musicien, le public a offert une qualité d’écoute sans faille durant les 26 minutes de ce voyage intense. Le jeune homme se contorsionne au-dessus de son clavier comme s’il ressentait dans tout son corps la douleur qui émane de cette musique. Troublant !
Sans doute un peu mal à l’aise d’être venus écouter de la musique russe dans pareil contexte, les spectateurs ont tout de même acclamé Trifonov, surtout après son interprétation du Concerto pour piano no 1 de Prokofiev, spectaculairement interprété après l’entracte. Le Russe a alors reçu une ovation monstre ! Il est d’ailleurs revenu pour un rappel avec Élégie de l’Ukrainien Mykola Lyssenko.
À ce repas musical déjà copieux, Rafael Payare et l’OSM ont ajouté deux oeuvres françaises, livrées avec dynamisme et finesse : La Péri de Dukas et La Mer de Debussy. Bref, 1h 40 de musique, plus un entracte, ça commence à ressembler à la durée des concerts d’avant la pandémie et ça fait du bien ! Une offre qui tient ce soir encore. À noter que ce concert a été enregistré et qu’il sera éventuellement disponible en webdiffusion.
Valentin Silvestrov : Prière pour l’Ukraine (arr. Eduard Resatsch)
Alfred Schnittke : Concerto pour piano et orchestre à cordes
Paul Dukas : La Péri
Entracte
Sergueï Prokofiev : Concerto pour piano no 1 en ré bémol majeur, op. 10