1603 : William Shakespeare écrit Hamlet, une tragédie dans laquelle un fils découvre que son père a été assassiné par son oncle puis témoigne du remariage de sa mère à ce même oncle. Il en résulte incompréhension, aberration, colère et confusion, un camaïeu d’émotions, qui de leur teinte des plus sombres aux plus pâles, emprisonnent Hamlet, corps et âme.
2017 : Marc Beaupré et François Blouin, nous présente ce classique de la littérature, à leur manière. Avec la complicité de la technologie du XXIe Hamlet est à la fois narrateur et acteur, témoin et protagoniste.
Seul sur scène, baignant dans le silence de ses pensées, Marc Beaupré (Hamlet) débute en pantomime. Une chorégraphie, brève, répétitive, têtue et insolente. L’écran transparent dressé devant la scène immortalise les silhouettes des mouvements dessinés par ces pas de danse et tout prend alors son sens. Hamlet ne fait que reproduire la danse infernale du drame qui est le sien : un oncle assassin de son père et qui épouse sa mère. Les apparences parfois surdimensionnées de certaines silhouettes, capturent le poids des ombres qui planent sur la conscience d’Hamlet et sèment des interrogations sans réponse. Quand bien même Hamlet s’immobilise, ces silhouettes elles, n’en font qu’à leur tête, illustrant l’impossibilité de mettre sur pause les souvenirs trop récents de plaies encore ouvertes.
Hamlet nous raconte son malheur, ses doutes et son désarroi et par là-même devient narrateur de son histoire. Marc Beaupré est Hamlet, mais tour à tour il est aussi le fantôme de son père, son oncle, sa mère, Polonius, Laertes et Horatio. Il est un et plusieurs, seul et accompagné, baignant dans la lumière et entouré d’ombres qu’il sait nous faire voir et ressentir. L’interprétation est un tour de force et une maitrise de l’art du théâtre crédible et soutenue par une utilisation astucieuse de l’espace et des recoins d’ombres.
La synchronisation des silhouettes de l’écran et la fluidité avec laquelle Marc Beaupré change de narrateur, de point de vue et de scène, en plus de facilité la compréhension de la pièce, susciteront chez certains une réflexion sur la réflexion : à chercher une explication à ce qui nous semble inacceptable, ne se condamne-t-on pas à revivre éternellement la cause de notre malaise et à être à tour de rôle chacune des personnes qui nous ont blessé?
L’écran transparent, tel un cordon de police devant une scène de crime, tient le spectateur à l’écart mais jamais ne lui cache la vue. Au contraire, voir devant soi Hamlet au travers de ce film confère l’intimité et la décence qui s’imposent devant un chef d’œuvre protégé. Le spectateur est dans la confidence d’un espace proche mais lointain, à l’image des réflexions d’Hamlet.
Si Hamlet est un classique de littérature, Hamlet_Director’s Cut mérite d’être salué pour sa mise en scène et son excellente interprétation. Les longs applaudissements assurés et les hochements de tête respectueux observés à la fin de la première, l’ont confirmé.
Deux supplémentaires viennent de s’ajouter: mercredi 5 avril à 20h et dimanche 9 avril 16h.
http://lachapelle.org/fr/calendrier/hamlet
- D’après
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- William Shakespeare
- Dans une traduction de
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- Jean Marc Dalpé
- Mise en scène et adaptation
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- François Blouin et Marc Beaupré
- Interprétation
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- Marc Beaupré
- Scénographie et conception visuelle
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- François Blouin
- Programmation créative et régie
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- Jonathan Jeanson et Hugo Laliberté
- Conception sonore
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- Nicolas Letarte-Bersianik
- Conseil à la dramaturgie et assistance à la mise en scène
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- Nicolas Guillemette
- Soutien à la production
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- Xavier Inchauspé
Photo: Benoit Beaupré