Après Sauf que Sam est mort, publié en 2021, puis Quelques solitudes, en 2022, ses deux premiers romans qui furent mes coups de cœur littéraires, Marianne Brisebois s’est ensuite intéressée à l’univers des sectes pour un duo de romans assez saisissant en 2023. Avec Balcons, pour son cinquième roman, l’autrice raconte une histoire d’amitié au masculin, tout en abordant des sujets assez délicats tels que le suicide, la violence psychologique et la culture du viol. Bien que les sujets soient lourds, ce roman est lumineux, car il donne espoir. Une amitié au masculin qui fait du bien.
Résumé : Au deuxième étage d’un duplex du Plateau, Xavier fixe l’horizon. Après avoir abandonné ses études, son implication militante à l’université et le stage de ses rêves, il se retrouve devant bien peu de choses – à part peut-être Éli, dont il partage l’appartement.
Accablé par la honte, Xavier essaie d’éviter de penser aux épisodes sombres d’un passé trop récent pour être oublié. Mais entre les souvenirs qui l’empêchent de dormir se dessineront peu à peu les petites et les grandes violences qui donnent le vertige, peu importe la hauteur du balcon.
Pour passer outre, Xavier devra mettre des mots sur ce qui lui est arrivé, ce qui le dévore de l’intérieur. Un récit à la fois doux et amer, réaliste pour le pire, peut-être trop beau pour le meilleur.
La grande force de Marianne Brisebois c’est sa plume remplie de finesse, de doigté et de sensibilité qui fait qu’elle peut aborder des sujets forts complexes et inhabituels avec beaucoup d’humanité et d’émotions qu’elle nous transmet si aisément. Avec Balcons, elle nous présente des personnages masculins attachants, qui sont loin des hommes mâles alpha, que l’on voit trop souvent. Elle nous présente des hommes qui font de l’introspection, qui se questionnent et tentent de se reprendre en main quand la vie leur a mis des obstacles énormes à surmonter et un passé ignoble qui les a hypothéqués pour leur confiance en eux.
C’est le cas de Xavier et d’Éli qui se rencontrent et qui deviendront des amis, pour le meilleur et surtout pour le pire. C’est beau de voir cette amitié, de voir comment ils s’épaulent, se consolent, se poussent à aller de l’avant, à réparer, à reprendre goût à la vie, à l’amour. Ces deux personnages, je les adore. Je trouve qu’ils vont vraiment bien ensemble comme amis. Ils s’aiment, mais aussi se gossent mutuellement. J’adore leurs dialogues, leurs rituels, l’excentricité d’Éli et le côté taciturne de Xavier. Ce roman n’est pas facile à lire par moment, lorsque ces deux hommes se racontent, petit à petit. Ce n’est jamais facile de parler de violence, de suicide, de viol, mais ces événements qu’ils se racontent ou se remémorent sont importants pour que l’on voie bien leur détresse, d’où elle vient et comment cela les a brisés. Mais ce qui est fabuleux par la suite, c’est de voir la manière dont ils se reconstruisent, ils avancent et reprennent goût peu à peu à la vie.
Je trouve que le titre de ce roman est très approprié. On en fait beaucoup référence dans le livre et j’aime le parallèle que l’autrice fait avec les balcons et la vie. «Depuis que je passe mes journées assis ici, on dirait que je me noie dans un narcissisme larmoyant, comme si je savais plus faire autre chose que méditer sur ma faille intérieure de gars pas de maison. Je m’auto-écoeure.
C’est le balcon qui fait ça. Les balcons en général. On a comme pas le choix de regarder la vue pis de penser qu’on pourrait très bien se pitcher en bas. C’est semi-prudent, même s’il y a des barreaux pis toute… y a deux sortes de monde qui chill sur leur balcon. Les gens heureux d’enfin prendre l’air, qui se sentent donc ben privilégiés d’avoir leur petit espace extérieur qu’ils envahissent de plantes pis de tomates….Eux autres, ça leur arrive jamais de penser à ce que ça ferait de sauter en bas d’un duplex. Après, y a ceux qui s’installent sur leur balcon en reculant leur chaise, comme s’ils avaient peur de tomber.»
Un autre moment où Xavier parle des balcons, lorsque cela le brûle à l’intérieur. «…Chaque fois que j’ai regardé mes maisons brûler. C’est peut-être pour ça que j’ai toujours préféré les balcons. Ça me donne l’impression d’être prêt à sauter si jamais les flammes devaient revenir, ça me laisse un peu d’air avant que la fumée s’intensifie. Mais y a aussi que le balcon fait pas vraiment partie de la maison. Il est à moitié public, à moitié une sortie. Pis moi, j’ai toujours eu le domicile ambigu. »
La majorité des moments cruciaux se passent sur le balcon dans ce roman et c’est pour cela aussi que je trouve le titre et l’image de la couverture des plus appropriés.
Au final, ce roman est bouleversant par moment, mais surtout lumineux et rempli de doux moments entre amis.
Les mots ont toujours fait partie de la vie de Marianne Brisebois, une autrice à la plume jeune, assumée, maîtrisée. Quand elle n’écrit pas, cette diplômée en psychologie et en communication adore débattre, discuter et refaire le monde. Ses deux romans, Sauf que Sam est mort (2021) et Quelques solitudes (2022), ont tous les deux connu un beau succès. En 2023, l’autrice signe la série Tant que ce sera l’été et Mais l’automne est arrivé et en 2024, le roman Balcons.
Nombre de pages : 242 pages
Prix : 24.95$
Date de parution : 23 mai 2024
Éditions Hurtubise : https://editionshurtubise.com/
Mon appréciation de ses romans précédents :
Tant que ce sera l’été : https://lesartsze.com/tant-que-ce-sera-lete-un-roman-parfois-deroutant-tres-introspectif-et-fascinant/
Sauf que Sam est mort : https://lesartsze.com/sauf-que-sam-est-mort-un-roman-a-la-fois-bouleversant-et-lumineux-une-ode-a-lamitie-et-a-lamour/
Quelques solitudes : https://lesartsze.com/quelques-solitudes-un-roman-riche-en-emotions-en-introspection-premier-coup-de-coeur-de-lautomne/