Les artisans du film Le guide de la famille parfaite, Louis Morissette, Émilie Bierre, Catherine Chabot et le réalisateur Ricardo Trogi, sont venus à Québec pour présenter leur film en grande première. Cette comédie dramatique hilarante sur la complexité d’élever nos enfants de nos jours, prendra l’affiche dans nos salles de cinéma au Québec, dont le cinéma le Clap, le 14 juillet prochain.
Synopsis : Sommes-nous dans une société « d’overparenting » ? Le film « Le Guide de la famille parfaite » se veut une comédie grand public qui expose en humour et soulève la question de la difficulté et la complexité d’élever des enfants dans une société d’ultra performance, nourrie par des parents qui, voulant donner le meilleur à leurs enfants, finissent par les étouffer. Parce qu’il est dangereux, le piège de vouloir faire des versions améliorées de nous-mêmes.
Mon appréciation du film sera disponible sur ce site dès le 14 juillet. Voici mes entrevues avec les artisans de ce film qui fait à la fois rire et réfléchir.
Questions pour Émilie Bierre (Rose) : Lors des auditions pour ce film, tu ne connaissais pas Louis Morissette. Comment as-tu obtenu ce rôle ? «J’ai passé seulement une audition pour avoir ce rôle, ce qui est plutôt particulier comme processus pour un long métrage. D’habitude on peut avoir jusqu’à 2, 3, ou même plus de call back pour un rôle. » Écoutez la suite : processus_audition_Emilie
Que penses-tu de la façon dont ce film décrit les milléniaux et les adolescents ? Est-ce que ça ressemble à la réalité autour de toi ? «Absolument. Et j’ai l’impression que plein de jeunes vont se reconnaître à plein de niveaux différents. » Écoutez la suite : vie_ados
Première collaboration avec Ricardo ? Comment est-il comme réalisateur ? «J’ai adoré travailler avec Ricardo. C’est une super belle première expérience. C’est quelqu’un qui amène beaucoup de rigolade sur un plateau. Et comme il y a un côté plus dramatique au film, à mesure qu’on avance dans l’histoire, je trouvais ça bien de pouvoir balancer le tout. Donc, on pouvait avoir beaucoup de plaisir sur le plateau, mais quand on devait se concentrer pour une scène, Ricardo devient plus sérieux et concentré. Il accompagne bien toute l’équipe. Mais les premiers jours de tournage ont été un peu déstabilisants, car Louis et Ricardo sont très proches dans la vie. Ils se parlent peu et se comprennent tout de suite. Aussi, ils font beaucoup de blagues. Tout le monde rit, mais il y a plusieurs de ces blagues qui sont plutôt des « insides » entre les deux. Après quelques jours, je me suis habitué à ce duo et ils sont devenus comme mes deux papas de plateau. »
Est-ce qu’il y a des scènes qui ont été plus difficiles pour toi à jouer ? « Il n’y a pas eu de scène particulièrement difficile à jouer. Il y avait des scènes avec beaucoup d’émotions, mais ce sont souvent les scènes que je préfère jouer en fait. Et j’étais tellement bien entouré. J’avais une belle chimie avec Louis qui s’est développée dès la première scène. Et l’énergie sur le plateau me permettait de me laisser aller complètement. Je dirais les moments les moins agréables sont ceux où j’ai dû me plonger dans des zones plus noires (vers la fin du film) et cela m’a plongé dans un état pas très agréable, mais ce sont des scènes cruciales à jouer, alors on y va à fond. »
Quelles sont tes ambitions au niveau de ta carrière qui est de plus en plus florissante ? « Étonnamment, ça fait quand même 12 ans que je fais ce métier, malgré mon jeune âge. J’ai eu plein de beaux projets et très peu de temps morts (je touche du bois que ça continue). Je sais que c’est vraiment ce que je veux faire dans la vie. C’est ma passion. Je n’ai pas de rôle précis qui m’intéresse, ou de sujets en particulier que je veux toucher. Mais je veux continuer à travailler sur des projets qui font réfléchir les gens et défendre des personnages dont j’aurai le goût de les amener au bout de ce qu’ils peuvent être. Je veux juste me laisser guider par les propositions, scénarios, demande d’auditions que je reçois et je prends ce qui me parle et m’inspire. Éventuellement, j’aimerais bien aussi faire de la réalisation, et même de la scénarisation, tout en continuant de jouer bien sûr.»
Questions pour Catherine Chabot (Marie-Soleil) : Qu’est-ce qui vous plaisait dans l’idée de jouer ce personnage et faire partie de ce projet de film ? «Ce que je trouve magnifique, c’est qu’il y a une sorte de critique sociale dans ce film. Et ce genre de mère que j’incarne, on la rencontre partout. Sur les réseaux sociaux, les «instamom» existent. Des mères qui vivent de l’exploitation de la mise en scène leur vie familiale sur les réseaux ça existe beaucoup. Et mettre des photos de bébés, ça attire les «likes». Écoutez la suite : le_vernis_craque.
Qu’est-ce qui fait la force de ce scénario écrit par Louis Morissette et ses deux acolytes ? «La force de l’écriture de Louis je trouve, est qu’il nous fait à la fois rire et pleurer. Il nous lance aussi sur des réflexions. Il nous fait une critique sociale de l’«overparenting », qui est de surprotéger et surcompenser pour son enfant.» Écoutez la suite: ecriture_scenario_Louis
Vu que vous jouez la mère de Mathis, vous avez beaucoup de vos scènes avec le jeune Xavier Lebel, pour qui c’est la première expérience de jeu. Comment c’était de tourner avec lui ? « C’était très agréable en fait de tourner avec Xavier. Faut dire qu’il est dans la famille élargie de Louis. Donc, les deux ont une belle complicité ensemble, ce qui a aidé au jeune Xavier à se sentir à l’aise de jouer avec nous, d’avoir une certaine familiarité et un sans-gêne qui a rendu le tournage facile et agréable. Et contrairement à ce qu’il peut paraître à l’écran, Xavier n’est pas aussi dissipé que le personnage dans le film. Il était plutôt taquin ce qui a ajouté au plaisir de jouer. Et sa mère a toujours été présente sur le plateau, donc, j’ai aussi développé une belle relation avec sa mère. »
Vous avez une petite fille de 5 mois, alors est-ce que suite à ce film, vous vous posez la question, à savoir si vous êtes un bon parent ? Si vous faites ce qu’il faut ? «Je me la pose constamment cette question. Je ne pensais pas que ce film allait m’amener ces questionnements et des insécurités aussi. » Écoutez la suite : catherine_la_mere.
Parmi vos autres projets, je vois que vous avez co-scénarisé avec Émile Gaudreault l’adaptation au grand écran de votre pièce éponyme Lignes de fuite. Et ce scénario vous allez le co-réaliser cette année aux côtés de Miryam Bouchard. Pouvez-vous m’en parler un peu ? « En fait c’est très librement inspiré de ma pièce. On a dû l’adapter pour le cinéma. L’histoire de ce film, c’est en fait une gang d’amis (6 amis) qui se retrouvent ensemble, dans une soirée d’été, déambulatoire, dans Montréal. L’alcool s’ajoute à cette soirée, ce qui fait éclater quelques vérités au passage. Ce film est une réflexion sur la génération Y, ma génération. Ce sont toutes mes angoisses qui ont été mises dans ce film (rires).»
Questions pour : Ricardo Trogi (réalisateur) : C’est votre deuxième film comme réalisateur sur des films de Louis Morissette en plus de ses projets télé (les Simones, Maison Bleue) sur lesquels vous réalisez également. Vous avez une grande complicité ensemble que les gens remarquent sur le plateau n’est-ce pas ? « On se comprend bien tous les deux. On ne se chicane jamais. Par contre, là où on clarifie des choses, c’est à l’étape du scénario.» écoutez la suite : collaboration_Ricardo_Louis
De réaliser un film, alors que celui qui a écrit en partie le scénario a un des rôles principaux, est-ce que cela rend la tâche du réalisateur plus facile ? « C’est sûr que oui. Car quand Louis va faire sa première prise, c’est rare qu’il va être à côté de la trac. C’est lui qui l’a écrit, alors il en connaît l’intention. À moins que ce soit moi qui aie mal compris la prémisse. Mais encore là, en cas de doute, on peut faire la scène de deux ou trois façons pour voir ce qui est le mieux au montage. » Écoutez la suite :scene_emotion_montage
Parle-moi des chansons dans le film. Elles sont très présentes et pertinentes à mon avis ? J’adore entre autres les deux chansons du générique Soleil, Soleil qui démarre en beauté le film et Love à la fin avec des photos et vidéos des acteurs et artisans dans leur enfance, dans le générique. Comment est venue cette idée ? «C’est une idée que j’avais en tête dès le départ. Je ne savais pas si j’allais la garder. J’ai demandé à tout le monde de m’envoyer des photos et vidéos d’eux enfants. Même si ce sont des photos un peu croche, floue, que le vidéo est assez moyen et que ça ne devrait pas passer à la télé, au contraire, on va le prendre, car ça fait très vrai. Cela montre la vraie fibre familiale, les parents qui trouvent beaux leurs enfants qui font un peu n’importe quoi et ils les filment. Cela met la table pour le film au début, et après, pourquoi ne pas l’incorporer aussi à la fin. »
Pour le choix des chansons, comment cela s’est-il fait ? « Louis et moi, on a choisi chacun une liste de propositions de chansons qui nous intéressaient, et graduellement, on leur trouvait une place ou non dans le film, selon ce qu’on ressentait. Par exemple, la chanson du générique Soleil, Soleil, je l’ai choisi parce que je trouvais ça léger. Ça fait familial, un peu nono. C’est très joyeux pour débuter le film. Avant de choisir au final cette chanson, j’ai donné à mon monteur une liste de 60 chansons, dont celle-là, en lui disant d’en prendre une pour le générique et lui aussi a choisi la même que j’avais en tête. »
Et il y a une chanson, avec une voix de jeune fille, qui joue à un moment crucial et assez stressant vers la fin du film, alors que la chanson est tout sauf stressante. Vous vouliez dédramatiser la situation et ne pas trop charger l’ambiance ? «Oui, entre autres» Écoutez la suite : chanson_personnage_rose
Il y a plusieurs acteurs/actrices qui ont des rôles fabuleux dans ce film. Naturellement Jean-Carl, la jeune vingtaine qui ne fout rien dans la vie. Il est génial dans ce rôle. Et les répliques du grand-père joué par Gilles Renault, c’est du bonbon. Et le Psy joué par Daniel Parent, il est adorable et tellement pertinent. Comment s’est passé le processus du choix des comédiens ? « C’est un processus où on propose des gens en auditions et au final, c’est Louis et moi qui avons la décision finale de choisir la meilleure personne. On doit être d’accord les deux. » Écoutez la suite : Jean_carl
Et le prochain film de Ricardo, la suite de 1981,1987, 1991 ? « Il devrait se tourner à l’automne 2022 peut-être. Il est écrit, mais comme il y a plusieurs demandes de financements ces temps-ci, et j’ai besoin d’un bon gros budget, alors il faut attendre la fin du processus de demande de production. Ce film raconte mon passage à la course destinations monde et je dois tourner dans au moins 2 -3 pays différents, dont un qui ne sera pas si simple. » Avec le titre 1994-1995, ce quatrième film inspiré de la jeunesse de Ricardo relatera ses péripéties alors qu’il faisait ses débuts comme réalisateur en participant à La Course destination monde, il y a 26 ans.
Question pour Louis Morissette (acteur, coscénariste et producteur) : vous avez coécrit ce scénario avec François Avard et Jean-François Léger, qu’est-ce qui fait que c’est si facile d’écrire ensemble depuis tant d’années ? « François Avard, ça fait 25 ans que je travaille avec lui et Jean-François c’est un ami de longue date, avec qui je joue au hockey. On se connaît tous très bien et on a les mêmes préoccupations. On est tous les trois des pères. On a un vécu similaire, on a le même langage. Pour chaque projet sur lequel on travaille ensemble, je pense qu’il faut qu’il y ait une personne qui arrive avec une vision. Dans ce cas-ci, j’ai fait un premier plan de travail et ensuite les autres embarquent avec moi dessus. Sur un autre projet, par exemple François Avard était l’instigateur de votez Bougon et je suis arrivé ensuite pour essayer d’amener sa réflexion le plus loin possible. C’est la même chose avec Jean-François qui écrit un projet sur lequel je planche avec lui en ce moment. L’important c’est qu’on soit là l’un pour l’autre pour travailler au profit de la vision du porteur du projet.»
Et la chimie avec Ricardo, elle est aussi bien présente depuis longtemps. «Oui vraiment» Écoutez la suite : chimie_Avec_Ricardo
J’adore les moments de confrontations entre le père et la fille. Des répliques baveuses, cinglantes, qui cherchent à toucher au point faible de l’autre, à ce qui fait mal. On dirait un match de boxe verbal. Et j’ai aimé tout autant le moment dans l’auto où le père et la fille se rapprochent enfin. Cette belle complicité on la sent très bien à ce moment. Comment c’était de jouer avec Émilie, que vous ne connaissiez pas avant le tournage ? « Cette scène dans l’auto avec la chanson d’Éric Lapointe, c’est notre première journée de tournage ensemble. Je n’étais même pas là pour son audition. » Écoutez la suite : audition_Emilie
Dans le film, il y a votre fille Delphine qui a un petit rôle, soit l’amie de Rose, c’est bien ça ? « Exactement, quand Rose arrive à l’école, alors qu’elle va à son casier, il y a le personnage de l’amie, joué par Delphine, qui vient lui parler et lui donner un muffin. Aussi, elle est à sa gauche dans la classe pendant les examens.»
Le jeune Xavier Lebel qui incarne le rôle de Mathis est génial. Il parait que vous l’avez trouvé dans votre famille élargie ? Écoutez la suite : Xavier
Au final, que voulez-vous qu’on retienne de ce film, un constat, une réflexion, un message ? «Ce que j’espère c’est que les gens se parlent suite au visionnement de ce film. En général, dans la vie, les gens ne se parlent pas tant que ça. Donc, je voudrais que ce film puisse engendrer une discussion entre parents et ados, ou encore dans le couple. J’espère que le film va les habiter assez longtemps pour se parler rendu à la maison, se questionner sur leur façon d’être comme parent, ou encore comment leurs enfants se sentent. Ce film reste un divertissement. On n’est pas là pour faire la morale, mais s’il peut faire réfléchir un peu pourquoi pas ?»
Finalement, le film s’est associé à la Fondation Jeunes en Tête. Lors de toutes les premières du film à Montréal et en région, les spectateurs pourront faire un don du montant de leur choix à la Fondation. Parlez-moi de cette fondation. Écoutez le parler de : fondation
Crédit photos : Réjeanne Bouchard