Ceux qui étaient à la Maison symphonique, ce mercredi soir (13 avril), n’oublieront sans doute pas de sitôt cette Passion selon saint Matthieu de Bach, avec le lumineux ténor Julian Prégardien. Au cas où pareille chance ne repasserait pas, on peut assister ce soir encore (14 avril) à ce concert où l’Orchestre symphonique de Montréal et deux choeurs sont dirigés par le Britannique Paul McCreesh.
Comme son titre l’indique, cet oratorio de Johann Sebastian Bach s’appuie sur le récit de la Passion de notre Seigneur Jésus-Christ selon l’Évangéliste Matthieu. En plus des récitatifs de l’Évangéliste, chantés par Prégardien, les principaux personnages impliqués dans la Passion interviennent à travers les différents solistes. Quant à la foule, elle est représentée par le Choeur de l’OSM et les Petits Chanteurs du Mont-Royal.
Cette passion repose en grande partie sur l’Évangéliste et le ténor Julian Prégardien prouve une fois de plus qu’il a la stature pour ce rôle de pilier dans une oeuvre monumentale. Sollicité du début à la fin de cette partition dont l’exécution dure plus de 3 heures incluant une pause, le ténor allemand chante tout par coeur et s’avère un narrateur très investi.
Sa voix souple lui permet de multiplier les nuances avec aisance. On regarde brièvement les surtitres, mais ce sont surtout les intonations du chanteur et sa gestuelle qui nous projettent dans cette histoire déchirante et qui semble faire écho à notre époque tourmentée.
À ses côtés, la basse Geoffroy Salvas a été remarquable dans l’interprétation de ses nombreux personnage (Judas, Ponce Pilate, etc.). Matthew Brook est convaincant en Jésus, en plus d’interpréter les parties de basse qu’on avait confiées à Philippe Sly avant qu’il annule sa participation. Les rôles secondaires sont assumés par l’alto Caitlin Hulcup, le ténor Werner Güra et la soprano Marie-Sophie Pollack, tous des chanteurs rigoureux.
Quant au chef invité, Paul McCreesh, il est visiblement très à l’aise avec les musiciens de l’OSM dont il dirige les entrées en scène avec précision, notamment en ce qui a trait à l’orgue Pierre-Béique. Le Britannique semble en territoire connu. Il faut dire qu’il a déjà gravé cette Passion sur disque avec son ensemble Gabrieli Players (Deutsche Grammophon, 2003).
En plus du plaisir d’écouter cette grande musique dans une salle d’une remarquable qualité acoustique, il y a l’espoir qui se dégage de cette oeuvre. Malgré le doute («Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as tu abandonné?») et la trahison («Avant que le coq chante tu me renieras trois fois»), cet oratorio demeure tourné vers la compassion et l’abandon à la douleur. L’espoir triomphe grâce à la foi exprimée surtout par les choristes : «Quand je devrai mourir, viens à mon aide! … Que le sépulcre et la pierre tombale soient un doux oreiller à l’âme inquiète et qu’elle y trouve le repos.»
Malgré tous les atouts de ce concert, il y avait de nombreux sièges vides à la Maison symphonique en ce mercredi soir. À vous de décider si vous prendrez part, ce soir, à ce temps fort de la semaine pascale.
J. S. Bach, Passion selon saint Matthieu, BWV 244
Orchestre symphonique de Montréal – Paul McCreesh, chef
Ténors : Julian Prégardien et Werner Güra / Basse : Matthew Brook et Geoffroy Salvas / Soprano : Marie-Sophie Pollack / Mezzo-soprano : Caitlin Hulcup
Choeur OSM – Jean-Sébastien Vallée, chef de choeur
Petits Chanteurs du Mont-Royal – Andrew Gray, chef de choeur
Maison symphonique
13 et 14 avril à 19h 30