Avec un 9e album en carrière intitulé «11 bis, rue d’Orchampt » un hommage à Dalida, Marie-Élaine Thibert ouvre une nouvelle page de sa carrière. Entre confidences sur ses débuts, ses inspirations profondes et ses défis personnels, l’artiste se livre avec la sincérité et l’émotion qu’on lui connaît. Rencontre avec une voix incontournable de la scène québécoise. 🎤
Vous avez trouvé votre Alain Delon auprès de Messmer pour Parole, parole, la chanson phare de votre nouvel album hommage à Dalida. Comment cette idée est-elle née?
En fait, on cherchait une belle voix grave. Chaque matin, mon conjoint Rémy Malo, réalisateur de mon album, et moi, on lançait des noms comme ça : Garou, Marc Labrèche, etc. On pensait à un comédien, à un chanteur. Puis, à un moment donné, je suis sortie de cette zone-là et j’ai pensé un peu plus loin. Je voyais le double sens… une voix grave, mais aussi un charmeur de serpents, comme Messmer. Dans Parole, parole, il essaie de reconquérir la fille en l’hypnotisant.
Puis j’ai pensé à Messmer. C’était évident, d’autant plus que je le connais. Maxime Landry, mon producteur, lui a écrit pour vérifier son intérêt. Le titre de l’album correspond à l’adresse où Dalida habitait.
Comment Messmer a-t-il réagi?
Il a tout de suite dit oui, même si l’idée de venir en studio l’angoissait un peu. On l’a rassuré. Ni lui ni moi ne sommes des acteurs, après tout. Et, de façon anecdotique, Messmer avait déjà tenté, sans succès, de m’hypnotiser. J’ai été la seule, sur 10 personnes, incluant Isabelle Maréchal, à ne pas faire la poule ou d’autres choses du genre!
Après toutes ces années de scène et un neuvième album, qu’est-ce qui vous pousse aujourd’hui à rendre hommage à Dalida? Était-elle un modèle?
C’est vrai qu’on m’a plus souvent comparée à Piaf – une petite avec une grande voix. Pourtant, Dalida a marqué la fin de mon adolescence. Après mes cours au cégep André-Laurendeau, on se retrouvait dans un bar karaoké où je chantais du Céline Dion, du Luce Dufault et du Dalida. À cette époque-là, c’est l’animateur de foule qui jouait mon Alain Delon!
Dans quelles circonstances ce projet d’album est-il né?
C’est Maxime Landry qui m’a proposé ce projet. Ça faisait longtemps qu’il y pensait. L’an dernier, je l’ai appelé pour qu’il soit mon producteur. Il est aussi un ami et un artiste. Au départ, je lui avais proposé un projet estival, style yéyé, à gogo. Lui avait en tête quelque chose de plus gros. Un jour, il a entendu une chanson de Dalida à la radio, et il a eu le déclic.
Comment comparez-vous vos voix?
Dalida est complètement dans mon registre vocal. Tandis que Céline Dion est soprano, moi, je suis alto-soprano. Je n’ai eu à changer aucune tonalité pour l’album, car ce sont exactement les miennes. Ça m’a rappelé les bons souvenirs du karaoké!
Vous avez chanté du Léveillée, du Brel, du Piaf, du Leclerc, du Gauthier, du Venne… Pourquoi ces artistes occupent-ils une place particulière dans votre parcours?
Inconsciemment, je retourne toujours vers ces époques. Je me sens vraiment dans mes pantoufles avec chacun d’eux.
Si on replonge dans vos débuts à Star Académie en 2003, quels apprentissages vous accompagnent encore aujourd’hui?
C’est spécial de chanter soudainement devant tout le monde. C’est là que j’ai découvert ce métier. J’essayais de me cacher des caméras… mais j’ai été obligée de m’ouvrir. J’ai pris conscience de mes talents et de ce que je pouvais offrir. Tu rencontres 1000 journalistes. Au début, en entrevue, je répondais juste oui ou non! Star Académie m’a donné la confiance nécessaire pour continuer et grandir. Et l’amour du public, ça nourrit énormément.
Le milieu musical a beaucoup changé depuis vos débuts. Comment votre propre rapport à la musique a-t-il évolué?
En 2003, on lançait un album et on devenait un sujet de discussion sur les forums parce que Facebook n’existait pas encore. Puis, Napster et les téléchargements gratuits sont arrivés. On a commencé à vendre moins d’albums. Honnêtement, je n’aime pas la façon de faire aujourd’hui, mais je n’ai pas le choix. Si je veux rester, je dois m’adapter aux réseaux sociaux. Heureusement, j’ai un public fidèle qui continue d’acheter mes albums. Et en studio, même si parfois je doute encore de moi, je me rappelle l’époque de Star Académie : il faut avoir confiance.
Avez-vous des projets de spectacles hommage à Dalida?
Oui, il y aura des spectacles en 2026-2027. Mais d’ici là, ceux qui aiment Dalida seront choyés avec des classiques comme Gigi l’amoroso, Besame mucho, etc. Étonnamment, j’ai aussi découvert Darla dirladada! On y entend une chorale africaine de 10 chanteurs qui sonnent comme 30, c’est extraordinaire. Mon album propose des chansons actualisées, non seulement dans les arrangements, mais aussi dans l’interprétation. Par exemple, je ne roule pas mes « r » comme Dalida, et mes versions sont vraiment différentes.
Photo : Blacky Patsy
Comment trouvez-vous l’équilibre entre votre vie d’artiste et votre vie personnelle, surtout avec un projet d’envergure comme celui-ci?
Ma fille a 12 ans, elle est en 6e année. Depuis la pandémie, on est beaucoup à la maison. Pour Dalida, Rémy et moi travaillons ensemble. Elle ira chez sa grand-maman, à qui elle est très attachée. J’aurais aimé avoir d’autres enfants. On a essayé, mais j’ai malheureusement fait une fausse couche. Rémy a déjà un enfant de 21 ans. Moi, j’ai 43 ans, lui en a 54. Je me suis fait à l’idée et je suis très heureuse avec ma fille.
