Après un premier roman sur sa mère intitulé Ma mère est un flamant rose (2013), celui, plus fictif, qui parle de son fils, Anna et l’enfant-vieillard, Francine Ruel aborde maintenant sa relation avec son père dans Mon père est un pigeon voyageur, aux éditions Libre expression. Elle nous dévoile avec candeur, ses réflexions, ses questionnements, ses blessures face à cette relation. C’est touchant à souhait.
Résumé : Dans ce récit, Francine Ruel part à la recherche d’un père perdu, afin de détenir quelque chose de tangible pour remplir les espaces vides, colmater les trous. Elle vient raconter une histoire qu’elle ne connaît pas, en fait, ou si peu, l’histoire de cet homme, ce presque inconnu, ce papa mystère. Le sien. Au fil des pages, elle tiendra la main de la petite Francine, cette Franchon, qui, du haut de ses sept ans, a vu ce père commis-voyageur s’envoler par la porte entrouverte. Elles ne seront pas trop de deux pour s’emparer des ombres qui leur ont échappé et saisir l’inexplicable abandon dans cette esquisse en clair-obscur.
En première page de son livre, Francine écrit ceci : «À défaut d’avoir réussi à réunir les drôles de moineaux que sont mes parents, j’envisage aujourd’hui de faire en sorte qu’ils se retrouvent enfin face à face, ou dos à dos, collés ensemble sur une tablette de librairie ou de bibliothèque.» Alors assurément que dans ma bibliothèque, ces deux livres sont maintenant réunis, selon son souhait.
J’ai replongé récemment dans son premier roman, celui sur sa mère, afin de me remémorer son histoire. Il est certain que Francine en connaît plus sur sa mère que son père qui les a quittés alors qu’elle avait 7 ans. Donc, ce deuxième livre, sur sa relation avec son père, est plutôt rempli de questions sans réponses, de fabulations pour satisfaire la jeune Franchon, ou encore de réflexions sur les blessures que ce vide a causé à Franchon et Francine, la jeune et l’adulte.
Bien candidement, avec une belle prose, Francine nous raconte quelques souvenirs, souvent pas clairs, de ses moments avec lui. Et certains de ses souvenirs, elle nous les avait déjà racontés dans son roman sur sa mère, mais elle les aborde de manière différente, sous l’angle avec son père. J’adore cette anecdote du plancher à cirer avec de grandes chaussettes. Ou encore la séance de chatouillements avec ses 5 filles. Et les fameuses «rides de char», toute la famille ensemble. Francine Ruel a le tour de raconter avec émotions et humanité des moments du quotidien qui nous touchent énormément.
Tout comme Franchon, je déplore qu’il y ait si peu de moments à se rappeler. Et nous devons nous contenter des questions sans réponses, des histoires inventées, présumées et des « Y parait que…», «j’ai entendu dire que…» sans jamais avoir les faits véridiques et surtout les raisons du pourquoi il a quitté, et comment il a vécu avec cela ? C’est ce qui est le plus frustrant autant pour nous que pour Francine, qui raconte même avoir refusé de voir son père, lorsqu’il a tenté un contact, plus de vingt ans plus tard, car il insisté « On peut se revoir à une seule condition : il n’est absolument pas question qu’on parle du passé.»
Par moment, Francine parle directement à son père, se défoule, lui remet tous ses malaises devant lui. Coucher sur papier ce qu’on ressent, cela aide sûrement. Et cela nous émeut. Elle raconte aussi comment, adulte, elle a tenté d’apprendre à danser le tango pour faire revivre ce joyeux moment où son père l’a fait tournoyer dans le salon sur un air de tango, à ses 6 ou 7 ans.
Au final, ce roman nous touche profondément et nous rappelle l’importance d’une relation père-fille. Cela nous suit toute notre vie, qu’on le veuille ou non.
Francine Ruel se consacre depuis plus de cinquante ans à l’écriture, au jeu et à l’enseignement. Figure connue du petit et du grand écran, elle a interprété divers rôles dans des films tels Coteau rouge, Aurore et Monsieur Lazhar ainsi que dans des séries télévisées, dont Scoop, qui lui a valu en 1993 un prix Gémeaux pour la meilleure interprétation dans un rôle de soutien.
En littérature, Francine Ruel a d’abord signé deux romans jeunesse (Des graffiti à suivre… et Mon père et moi) et deux contes pour tous, d’après l’œuvre de Marc-Aurèle Fortin (L’Enfant dans les arbres) et de Marc-Aurèle de Foy Suzor-Coté (Marion et le Bout du bout du monde) pour le Musée national des beaux-arts du Québec. Elle a également publié deux recueils de chroniques parus dans le quotidien Le Soleil (Plaisirs partagés et D’autres plaisirs partagés) et plusieurs romans, dont ma mère est un flamant rose (2013) et sa fameuse saga du bonheur, qui s’est vendue à près de 150 000 exemplaires. Véritable best-seller au Québec, son livre Anna et l’enfant-vieillard s’est vendu à 58 000 exemplaires.
Nombre de pages : 200 pages
Prix normal 24,95 $
Date de sortie 10 octobre 2024
Maison d’édition Libre Expression : https://editionslibreexpression.groupelivre.com/
Mon appréciation d’un de ses livres précédents : https://lesartsze.com/le-promeneur-de-chevres-de-francin-ruel-un-roman-doux-et-bienveillant-qui-fait-du-bien/