À moins de deux mois de ses 70 ans, l’énergique Marjo a fait trembler le Club Soda, hier soir, dans le cadre des Francos. La coach de la dernière saison de La Voix a ressorti des tubes des débuts de sa carrière, au grand bonheur d’un parterre rempli de jeunes admirateurs qui n’étaient pas encore nés à l’époque du mythique groupe Corbeau, fondé dans les années 1970. Alors que les spectateurs plus âgés étaient assis dans les gradins, les plus jeunes s’agglutinaient devant la scène dans le but de pouvoir toucher la main de cette éternelle amoureuse de la vie…
Dès les premiers accords saccadés d’Illégal, on n’a plus d’âge! Toutes les générations confondues lèvent les bras en signe de joie devant l’inusable Marjolène Morin. La belle délinquante adapte d’ailleurs, sur-le-champ, les paroles de cet hymne emblématique du rock québécois: «Tu m’fais faire des bêtises, icitte au Club Soda». De ce même disque de Corbeau sorti il y a plus de 40 ans, on aura droit à Maladie d’amour, avant le passer aux tubes des albums solo de Marjo dont l’incontournable Chats sauvages.
Même si elle est tombée sur scène en s’amusant avec un ballon et qu’elle a ensuite failli trébucher sur une bouteille d’eau, la Montréalaise n’allait pas se laisser décontenancer par si peu. Fière de sa longue carrière, elle résume ainsi son parcours: «j’ai laissé des traces», dit-elle, en estimant avoir inspiré de jeunes artistes dont Ariane Roy et Lou-Adriane Cassidy.
Elle raconte aussi qu’elle en menait large dans Corbeau, dont elle était la seule fille. «J’avais le droit de dire tout ce que je voulais!» Du même souffle, elle nous ramène des chansons moins glorieuses de cette période, dont Baby Lily qui fait l’éloge d’une femme brutalisant un homme!
Heureusement, Marjo a su évoluer et nous a donné, par la suite, des chansons qui nourrissent nos vies depuis des décennies. Entière et paradoxale, elle assume sans détour les pôles de sa forte personnalité, qu’il s’agisse de la fougue vindicative de J’lâche pas, ou de l’insolence lascive de Provocante, sans oublier la tendresse de Doux et de Tant qu’il y aura des enfants.
Coquette, elle retire sa blouse blanche sur scène, laissant voir au public sa camisole noire moulante. Puis, chaque chanson semble être une fête pour Marjo qui laisse planer ses longs bras en direction de la foule qu’elle appelle «ma belle gang».
Sa voix se brise par moments, mais l’interprète émeut encore et toujours grâce à son inépuisable fougue et son immense désir d’être en communion avec le public, tout en demeurant farouchement elle-même. «J’vas faire ma vie comme j’l’ai toujours pensé», gronde-t-elle au rappel, avec Amoureuse de la vie. Il y a chez elle une force et une spontanéité si belles à voir qu’elles font monter les larmes aux yeux.
Après toutes ces années de scène, elle nous bouleverse encore en nous entraînant dans les montagnes russes de sa rage de vivre teintée de détresse: «Trop souvent, on fait semblant d’aimer… Ça hurle, ça brûle en dedans (trop d’amour qui dort).» Tout est joué dans des arrangements similaires aux originaux, grâce à quatre solides musiciens sous la direction du claviériste Pascal Mailloux, complice artistique de longue date de Marjo.
Si heureuse de nous avoir près d’elle, l’artiste à la générosité proverbiale ajoute: «on s’en fait-tu une petite dernière?» Proposition adoptée à l’unanimité! «S’il fallait qu’un jour Dans un grand tourbillon Tu effaces mon nom J’en crèverais, je le jure Je le jure». Portée par une incessante vague d’amour et ainsi rassurée, la dame a placé une main au-dessus de son oreille pour écouter le public lui chanter Moi qui n’aime que toi. Longue vie à la reine Marjo!
Marjo était en spectacle au Club Soda, le 9 juin, aux Francos de Montréal.
Parmi les spectacles gratuits à voir, en fin de semaine, aux Francos:
–Roxane Bruneau, 10 juin à 21h
–Coeur de pirate, 11 juin à 21h
Programmation complète des Francos
*Photos fournies par l’équipe des Francos