L’adaptation pour le théâtre du film québécois Deux femmes en or a le mérite d’être parfois comique, grâce aux talents de cinq comédiens généralement convaincants. L’auteure, Catherine Léger, a conservé le canevas de base avec deux femmes de banlieue qui trouvent le temps long et qui tentent de se divertir en attirant chez elles d’éventuel(le)s partenaires sexuel(le)s. Le tout est transposé à l’ère de #MeToo et s’accompagne d’un discours sermonneur trempé dans une mauvaise foi agaçante!
Plus de 50 ans après la parution du film de Claude Fournier et Marie-Josée Raymond, on nous ramène ces deux banlieusardes qui s’ennuient et devinez à cause de qui? Leurs maris, évidemment! Sophie Desmarais incarne celle qui est en congé de maternité, en l’absence de son époux (Mathieu Quesnel), qui est en constant déplacement à cause de son boulot. Leur voisine, interprétée par Isabelle Brouillette, est en arrêt de travail et elle cesse de prendre ses antidépresseurs, ce qui changera considérablement la dynamique de sa relation avec son conjoint (Steve Laplante).
Toujours est-il que les dames reçoivent, tour à tour, un employé de Vidéotron, un exterminateur et une livreuse de colis dans le but d’avoir des rapports sexuels. La plupart de ces scènes sont cocasses mais deviennent vite redondantes. Là où ça se gâte, c’est lorsqu’on tente de tenir les maris responsables de l’inertie de leurs conjointes qui seraient prisonnières de leur vie rangée.
Les «femmes en or» en arrivent à la conclusion que leur lassitude est le résultat de décisions prises par les hommes. L’une d’entre elles évoque, entre autres, les origines de la monogamie qui aurait été inventée uniquement en fonction de volontés masculines. Si tel est le cas, l’auteure évite de dire que la monogamie est depuis bien longtemps une exigence non-négociable de tant de conjointes prêtes à briser leur union, en cas d’infidélité de monsieur.
Pas plus tard qu’en février dernier, combien de femmes ont condamné sans appel l’ex-maire de Toronto pour une relation extraconjugale? Il semble que le concept à la mode de polyamour n’est pas permis à tous…
Dans un autre moment de prêchi-prêcha truffé de raccourcis historiques, il est question de la guerre qui ne serait qu’une affaire d’hommes. Madame Léger, qui semble s’intéresser à l’histoire, aurait-t-elle oublié, entre autres, les méthodes de Catherine II, impératrice de Russie et de Margaret Thatcher, ex-première ministre du Royaume-Uni?
L’une des femmes en or ajoute que les hommes n’ont qu’à se dépatouiller avec les guerres. C’est justement ce qui se produit, présentement, en Ukraine, où les hommes de 18 à 60 ans n’ont pas le droit de quitter leur pays, depuis le début de la guerre, alors que les femmes peuvent très bien aller se réfugier ailleurs. Curieux que cette situation, d’une iniquité extrême et d’une actualité aussi criante, ne traverse pas l’esprit des héroïnes de madame Léger pourtant supposément si avides d’égalité!
Quant aux personnages masculins, ce sont des faire-valoir. L’un des hommes (Quesnel) travaille souvent sur la route mais, sa vie nous est résumée comme une sorte de partie de plaisir qui culmine dans ses rencontres avec sa maîtresse, incarnée par Charlotte Aubin. Quant à l’autre mari (Laplante), il commence à son tour à prendre des antidépresseurs. L’auteure lui fait même dire que les femmes ont tellement pris de pilules pour supporter leur vie ennuyeuse que c’est au tour des hommes de goûter à cette médecine! Wow! Belle logique revancharde! Va-t-on au théâtre pour entendre des choses pareilles?
Bref, cette pièce m’est apparue comme un ramassis de clichés transposés à notre époque où Marie-Mai et Catherine Dorion deviennent des sources d’inspiration pour les «femmes en or». Heureusement, la mise en scène imaginative de Philippe Lambert apporte un peu de piquant à cette histoire somme toute prévisible et d’une minceur désolante!
Deux femmes en or
Texte: Catherine Léger
Adaptation du film de Claude Fournier et Marie-José Raymond
Avec: Sophie Desmarais, Isabelle Brouillette, Steve Laplante, Mathieu Quesnel et Charlotte Aubin
À La Licorne, jusqu’au 20 mai / Détails
*Sur la photo d’accueil: Sophie Desmarais et Isabelle Brouillette
Crédit: Suzane O’Neill