Une autre soirée mémorable au Festival international de jazz de Montréal avec le chanteur de jazz-soul américain Gregory Porter. La chaleur de son timbre de baryton planait dans la Maison symphonique comme un câlin venu du ciel. L’auteur-compositeur-interprète qui est aussi acteur, sait communiquer ses impressions sur la vie quotidienne avec douceur et simplicité, dans un heureux mélange de jazz, de soul, de blues et de gospel. Bref, un univers musical enveloppant qui fait un bien fou !
Entouré de six musiciens de haut calibre, Porter ouvre la soirée avec Holding on de son disque Take me to the alley qui lui a valu le Grammy du meilleur album de jazz vocal en 2017. Influencé par la musique soul de Marvin Gaye et le jazz de Nat King Cole, ce gentil géant en impose avec sa voix puissante et ses grandes qualités d’interprète. Les mots de ses chansons s’accompagnent de gestes précis avec les doigts, les mains ou alors les bras grands ouverts, au gré des émotions exprimées.
Le quinquagénaire porte une casquette noire munie de bandes de tissus qui cachent le contour de son visage. Le chanteur a expliqué qu’il avait pris cette décision après avoir subi plusieurs opérations. Dans une entrevue accordée au site Jazz Weekly, en 2012, Porter ajoutait : «Les gens me reconnaissent désormais grâce à ça.»
Sur le ton de la confidence, l’artiste fait valoir que nous avons réalisé bien des choses au cours de la pandémie; entre autres, dit-il, nous avons compris que le plus important dans la vie n’est pas nécessairement de posséder une voiture de luxe, mais plutôt d’être bien avec ceux qui comptent pour nous.
Aimer, c’est là l’essentiel de son propos et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ses chansons sont loin d’être des ballades sirupeuses. Elles témoignent plutôt de la vision du monde d’un homme au grand coeur qui ne s’illusionne pas sur la condition humaine : «If love is overrated / Let me be the one that is naive». Cette chanson figure sur l’album All rise lancé en pleine pandémie.
Sans taire ses doutes, Porter chante sa foi en l’avenir et il entraîne avec lui le public montréalais : «clap your hands to the rhythm of your heart !». On répond à son invitation ! Comme dans une immense chorale gospel, on tape des mains partout dans la Maison symphonique sur l’entraînante Liquid Spirit, chanson-titre d’un autre disque qui lui a valu un prix Grammy.
Porter émeut en chantant ceux qui sont seuls et affligés (Take me to the alley), ou en s’attardant aux oiseaux aux ailes brisées (No love dying), etc., mais le rêve et la joie ne sont jamais bien longtemps éclipsés par les côtés sombres de la réalité. Enjoué, le chanteur se lance même avec son contrebassiste dans un extrait endiablé de My Girl du groupe The Temptations !
Ce chanteur, philosophe dans l’âme, est doté d’une voix de velours qui agit comme un baume ! Il nous aura fait vivre près de deux heures de bonheur !
Gregory Porter / Maison symphonique / 1er juillet 2022 / 42e édition du Festival international de jazz de Montréal.