Première montréalaise, ce soir, à la Place des Arts, du nouveau spectacle de Fred Pellerin. Seul sur scène, l’artiste nous entraîne avec humour dans La descente aux affaires de Toussaint Brodeur. À travers de nombreuses péripéties, ce commerçant de Saint-Élie-de-Caxton, un peu retors, s’apprête à vivre un évènement marquant, entouré de ses clients, des personnages caxtoniens que l’on retrouve comme de la parenté : Jeanette Brodeur, le curé du village, le barbier Méo, etc. Sans accessoires ni costumes, le conteur fait revivre toute cette faune, en plus d’interpréter quelques chansons bien connues du public. Bref, tous les ingrédients qui ont fait le succès de Pellerin sont une fois de plus réunis, mais la magie opère-t-elle toujours?
Comique
Sans être un spectacle d’humour, La descente aux affaires est parsemée de moments drôles. Entre autres, il faut voir et entendre le curé parler en anglais à l’oncle Richard, citoyen américain, qui revient à Saint-Élie-de-Caxton, en tant qu’exécuteur testamentaire. Cette scène reflète avec tendresse la bonne volonté des villageois qui ne demandent qu’à entrer en communication avec le visiteur, en baragouinant candidement la langue de Shakespeare. Hilarant!
Comment l’oncle Richard est-il devenu riche? «Il suffit de savoir compter» répond ce crésus venu du pays de l’Oncle Sam. Toussaint Brodeur est lui aussi déterminé à faire de l’argent, quitte à prendre certains raccourcis. Entre autres, il brûle les étapes en fabriquant son pain, ce qui aura des effets fâcheux chez tous ses clients. On est d’ailleurs un peu étonné d’entendre, ici, des plaisanteries scatologiques, ce qui est plutôt rare dans l’univers de Pellerin.
Chansons
Cela dit, on comprend vite que Toussaint (personnage incarné par Luc Picard dans le film Babine) est aussi un homme de cœur. Il aime profondément sa Jeanette mais, il apprendra à la dure que bien souvent ce qui compte le plus ne se compte pas; c’est là une autre maxime de l’oncle Richard.
Entre ses voyages à cheval à Shawinigan, Louiseville, etc., Toussaint semble nous livrer le plus profond de son âme, à travers de magnifiques chansons, dont : Les immortelles (Ferland), S’il fallait qu’un jour (Marjo), Je m’envolerai (endisquée, entre autres, par Pellerin), Tu m’aimes-tu (Richard Desjardins). Fred s’accompagne à la guitare ou à l’accordéon; il joue aussi de l’harmonica. Ses interprétations d’une grande justesse ajoutent une lumineuse part d’émotion à ce récit à la fois joyeux et profond.
Le conteur dialogue, entre autres, avec l’Éternité qui se manifeste par un jeu d’éclairage soigné. Cette interlocutrice qui, elle aussi, sait compter, rappellera d’ailleurs une règle incontournable à Toussaint Brodeur.
En résumé, La descente aux affaires ne déroutera pas les admirateurs de Fred Pellerin puisque l’artiste reste fidèle à la formule simple et efficace de spectacles précédents. Dans ce monde où on se parlait entre quatre yeux, bien avant l’arrivée des réseaux sociaux, il n’y a pas vraiment de bons et de méchants; simplement des humains qui tentent de tirer leur épingle du jeu.
Attentif du début à la fin, le public qui remplissait le Théâtre Maisonneuve, ce mercredi, a longuement ovationné Fred Pellerin, au terme de sa prestation d’environ 90 minutes. De toute évidence, on ne se lasse pas de l’univers de ce conteur-chanteur qui, sans prétention, nous rappelle nos origines en nous touchant en plein coeur.
Fred Pellerin / La descente aux affaires
Au Théâtre Maisonneuve jusqu’au 5 mars / Billets
De retour au Théâtre Maisonneuve du 21 au 24 septembre