L’Orchestre symphonique de Montréal connaît une semaine faste avec la venue du fabuleux jeune pianiste (né en 1995) George Li, jouant le premier Concerto pour piano et orchestre de Franz Liszt sous le bâton de Michael Tilson Thomas. Le jeune pianiste a causé, certainement avec son interprétation radieuse, la sensation la plus forte ressentie par les mélomanes montréalais cette année avec l’inoubliable concert Schumann de Martin Hemchen et le récent récital de Jean-Philippe Collard. Il y a de hauts faits musicaux qui s’inscrivent dans une hiérarchie du souvenir ineffaçable!
George Li dont on avait abondamment parlé dans nos pages lors des derniers concours Tchaïkovsky (médaillé d’argent) et Chopin (duquel il a bien fait de se retirer quoiqu’il y était destiné pour faire beaucoup parler de lui) est un étudiant de Wha Kyung Byun, grande musicienne et l’épouse du grand pédagogue américain Russel Sherman jadis pianiste réputé.
La carrière de soliste exige huit heures de travail quotidien de l’instrument, des itinéraires de voyages brefs dans des villes diverses que de tels emplois du temps empêchent d’explorer comme des tempéraments bohèmes devraient pouvoir le faire, afin de pousser au plus haut point la rêverie poétique voire même cosmique: cette vie austère impose un mode de vie où un génial tempérament comme George Li peut quand même se ressourcer par les livres de la haute littérature mondiale voire la relecture de la poésie des grands auteurs. George Li joue donc, on le sent à chaque moment, comme un jeune artiste délicatement cultivé, doté d’un jugement et d’un goût exquis.
Son jeu de fine sensibilité nous emporte aux plus fines distinctions sonores, car il est infaillible de netteté, d’éloquence et d’adresse tendre ou fougueuse aux moments opportuns et désignés. Son rappel, après le concerto largement encensé par le public fut jadis une réécriture d’un chant de Schumann Widmung, par Liszt – ce roi de la paraphrase et des réécritures des idées des autres. Ce rappel permettait de discerner encore davantage chez George Li une sublime palette sonore et des coloris envoûtants.
Michael Tilson Thomas dont c’était la première visite pour un concert diffusé en direct sur la page Facebook et par Medici.tv a mené l’orchestre montréalais tout aussi adroitement et sûrement dans la Symphonie 81 de Joseph Haydn que dans le tortueux et énergique Concerto pour orchestre de Béla Bartok. Le concert est en reprise le 23 mai. Evgenyi Kissin suit le 25 mai prochain avec un récital très attendu et nous avons eu un beau concert de l’Orchestre de Toronto, invité par l‘OSM mardi 22 mai, à jouer à la Maison Symphonique sous le chef Andrew Davis un programme où Louis Lortie interprétait adroitement comme toujours cette fois les Variations Symphoniques de César Franck, puis le chef nous a fait apprécier la richesse de l’orchestre torontois dans la fameuse septième symphonie de Mahler, autre oeuvre exigeante pour le public comme pour les musiciens de l’orchestre.
À noter que George Li donnera trois récitals à Verbier en Suisse, cet été, avis donc aux vacanciers de passage là-bas, entre le 21 et le 27 juillet à ce grand festival.
Photo : Simon Fowler