Un acteur vedette d’Hollywood (David Boutin), un metteur en scène anglais bien établi (Frédéric Blanchette) et une dramaturge irlandaise montante (Lauren Hartley) sont réunis pour la création, à Londres, d’une pièce de théâtre attendue. Mais, leur première rencontre, à l’aube des répétitions, tourne au vinaigre, car leurs visions des enjeux abordés dans leur spectacle semblent irréconciliables. Cette comédie noire du dramaturge irlandais David Ireland repose sur un trio de personnages aux doubles discours, devant lesquels on risque de rire jaune, selon le metteur en scène Maxime Denommée.
Un peu partout dans le monde, les interprétations de l’histoire diffèrent, ce qui génère souvent de profonds différends. Or, ici, nous avons affaire à un acteur américain oscarisé qui veut briller dans une nouvelle pièce en lien avec ses racines irlandaises. Faut-il rappeler la complexité politique de l’Irlande et, notamment, de l’Ulster, dont de nombreux Américains se définissent comme des descendants. Or, dans cette province irlandaise, certains comtés britanniques relèvent de l’autorité de l’Irlande du Nord, dont le siège est à Belfast, alors que d’autres comtés sont demeurés dans l’Irlande indépendante.
On s’en doute, l’acteur vedette (Boutin) voudra que la pièce reflète sa vision des choses. Mais, la dramaturge (Hartley) acceptera-t-elle de changer son histoire ? Après tout, ce comédien est l’une de ses grandes idoles et il pourrait bien lui ouvrir des portes à l’échelle internationale. Quant au metteur en scène (Blanchette), même s’il est en quelque sorte le parrain artistique de l’autrice, il sait que le succès du spectacle dépend en bonne partie de son acteur vedette.
Égos surdimensionnés
Le metteur en scène, Maxime Denommée, souligne que «ce texte aborde de front et avec humour, la question de l’identité : celle qui nous définit en tant que personne, mais aussi celle qu’on choisit de dévoiler aux yeux des autres. En même temps, la pièce montre le fossé qu’il y a souvent entre la perception qu’on a de quelqu’un et sa
véritable nature.»
Ulster American «ausculte également l’épineuse question de l’identité politique et culturelle, tout en scrutant l’ambition dévorante qui pousse parfois les gens à piétiner leurs propres valeurs. Du même souffle, on montre les ravages que peuvent générer les égos surdimensionnés».
Denommée souligne également que l’auteur, David Ireland, a choisi un personnage féminin pour représenter son alter ego, ce qui permet d’évoquer le féminisme de façade, qu’on adopte par pur opportunisme. «Mais, il n’y a pas de bons et de méchants dans cette pièce. Tous les trois sont animés par un certain arrivisme. Enfin, je souhaite que l’exercice amène les spectateurs à un examen de conscience. Est-ce que les personnages de cette pièce nous ressemblent ? Alors, pouvons-nous vraiment rire de ce qu’ils disent et ce qu’ils font ? Et nous mêmes, nos paroles sont-elles bien le miroir de nos actions ?
Première traduction française
C’est la première fois que Ulster American est présentée en français. La traduction est de François Archambault, auteur, entre autres, des pièces Tu te souviendras de moi et La société des loisirs.
Ulster American
Texte : David Ireland / Traduction : François Archambault
Mise en scène : Maxime Denommée
Interprétation : Frédéric Blanchette, David Boutin et Lauren Hartley
Décor : Olivier Landreville
À La Licorne, du 19 octobre au 13 novembre
*Sur la première photo : Frédéric Blanchette et David Boutin / Crédit : Thanh Pham