Ce fut une belle soirée musicale, lundi le 6 juillet dernier, au Festival de Lanaudière alors que Yannick-Nézet Séguin et son orchestre avaient choisi de nous faire découvrir une compositrice française inconnue Louise Farrenc (1804-1875 née Jeanne-Louise Dumont) et sa seconde symphonie. Une belle oeuvre dont l’esthétique appartient à tout ce qui fut créé entre Joesph Haydn, Nepomunk Hummel, Felix Mendelssohn tout juste aussi nettes d’élégance que les toutes premières symphonies de Schumann.

La soirée fut aussi l’occasion de découvrir une personnalité musicale québécoise: il s’agit du nouveau directeur du festival, Renaud Loranger, un visage fascinant, avec un regard de profonde intelligence puisqu’il vint expliquer d’une belle voix pleine de sensibilité le pourquoi ou le comment du remplacement de la mezzo Susan Graham par Karen Cargill acceptant, au pied levé, de remplacer la première artiste incommodée par un malaise. Madame Cargill qui s’est courageusement acquittée de la difficile interprétation de La mort de Cléopâtre de Berlioz qui exige pendant 22 minutes une voix extrêmement puissante (dans le genre des voix légendaires de Leontyne Price ou Jessye Norman encore jeunes!) a fait de son mieux pour faire entendre le texte poétique et musical de l’oeuvre. Ce n’était pas la diction de Norman ni celle des Geraldine Farrar oue Eilleen Farrel, mais la soirée fut sauve.
Le public a surtout écouté avec affabilité la belle symphonie de Louise Farrenc suivie des propos de Nézet-Séguin qui intervint tout spécialement pour faire taire les sceptiques en affirmant que cette créatrice avait une tout à fait une sonorité bien à elle, voire même qu’on serait dorénavant en voie de la discerner sans conteste (serait-ce par le biais d’enregistrements à venir? ça reste encore un mystère…). Nous allons prendre le chef au mot car ce n’est pas une seule audition qui puisse nous convaincre que nous avons là une identité sonore musicale aussi discernable en quelques mesures que celle d’un Brahms ou d’un Schubert, mais nous voilà enrichis d’un nouveau corpus musical.
Suivirent trois extraits de Roméo et Juliette de Berlioz pour clore le concert qui ne faisait pas salle comble mais pour lequel des clubs de mélomanes passionnés (celui du café d’Art vocal, ancienne rue Amherst par exemple) s’étaient déplacés en grand nombre par bus nolisés ce qui souligne l’importance artistique de ce festival de musique classique au pays. En effet, il faut bien le répéter, se déplacer vers Joliette et sa belle région et y découvrir au passage les jolies villes anciennes de L’Assomption par exemple, les musées d’histoire du Canada français peut tout à fait enrichir cette escapade musicale, quoique cela exige des efforts de temps, financiers et d’énergie que la jeunesse d’aujourd’hui n’a pas encore appris à fournir. Le public du 6 juillet était encore constitué d’une même génération fort âgée, le parterre couvert lui surtout, au tiers vide… et la pelouse moins remplis qu’aux brillantes années Dutoit.
Espérons qu’avec la venue de Renaud Loranger à la direction artistique, qu’un grand coup de barre sera fourni pour attirer le jeune public de la région même entre Repentigny et Trois-Rivières par exemple qui (j’en ai interrogé plusieurs en route vers Joliette) ignoraient complètement l’existence du festival sans être bien entendu du cercle restreint des instruits ou passionnés de la musique dite classique. Mais tout le monde de ce patelin de Lanaudière devrait connaître l’existence et la programmation de ce festival.
À ce chapitre de l’extraordinaire ou du sensationnel avec dns notre mire le 26 juillet prochain, voilà l’occasion rêvée de parader un talentueux artiste et donc de faire connaître le grand gagnant du dernier concours Chopin de Varsovie, Seong-Jin Cho. Le programme annonce qu’il interprètera le quatrième concerto pour piano et orchestre de Beethoven, à mon avis le plus beau avec le troisième, encadré par l’Orchestre Métropolitain sous Nézet-Séguin. Ensuite, dimanche 28 juillet à 14 h, il sera suivi du plus éblouissant programme d’ambition musicale qui puisse être imaginé avec prouesse soit rien de moins que les deux concertos pour piano et orchestre magnifiques, interprétés en un même soir, par le pianiste québécois Marc-André Hamelin (connu mondialement sous le sobriquet MAH) et qui n’a d’ailleurs aucun lien de parenté avec son demi-homonyme du nom de famille Richard-Hamelin et dont le prénom Charles nous rappelle encore vaguement qu’il avait remporté de second prix du même concours Chopin en 2015.
Ce sera l’autre Hamelin qui relèvera ce défi, le plus âgé, le plus puissant portant ce patronyme. Sachez aussi que lesartsze.com sera présent au prochain en ma personne au concours Chopin 2020 à Varsovie afin de bien couvrir cet événement mondial où se révèlent les grands talents actuels en leur jeunesse quasi-olympique, comme virtuoses du piano classique. Ainsi, il en fut de celui du concours Tchaikovsky à Moscou tout récemment où Alexandre Kantorow (dont jù,ai abondamment parlé), un jeune Français doté du talent des plus grands s’est illustré au-delà de tous et chacun de ceux qui avaient pu franchir les étapes préliminaires, il y a un mois à peine… (je fais allusion à un niveau de jeu atteint tel celui des Émile Guilels, Nikita Magaloff, Grigory Sokolov, Ivan Moravec, Maurizio Pollini etc).
Accourons donc les 26 et 28 juillet prochains avec hâte vers Joliette et son festival pour entendre l’excellent pianiste Seong-Jin Cho et son aîné de plus de trente ans, le maître technicien d’inégalable dextérité au clavier, le Québécois Marc-André Hamelin!
Crédit photo: PurePerception