Le cinéaste Paul Émile d’Entremont a offert, avec son film Franchir la ligne, un outil documentaire à diffuser dans les écoles de notre pays, d’un océan à l’autre ou au moins au Québec et en Acadie.
Les athlètes gais talentueux paniquent à la peur de devenir le point de mire de l’opinion publique, de recevoir des courriels ou messages haineux, surtout la perte des commanditaires et salaires faramineux des ligues majeures comme ce fut le cas d’un footballeur universitaire américain talentueux qui fit son coming out au moment de joindre une grande équipe professionnelle qui, elle, annula immédiatement son contrat avec lui. En somme, on croirait tourner en rond.
Au contraire de ce pessimisme, David Testo, joueur de l’Impact de Montréal qui en a aussi fait la dure épreuve il y a plus d’une décennie, nous amène en conscience jusqu’à l’école secondaire américaine où il explique, par reviviscence, combien il fut envahi (on le voit à la caméra) par les pires mauvais sentiments d’inadéquation. Son expérience est dramatique et il fut absent, samedi 30 novembre, à la discussion suivant le lancement du film.
Un autre sportif professionnel courageux, le gardien de but Brock McGillis, très présent durant et après la projection, nous a raconté combien on l’a exclu (à la suite de son coming out) des stages de formation avec des équipes de jeunes hockeyeurs ayant pourtant formellement contracté avec son entreprise.
En sport individuel, la patineuse de vitesse longue piste, l’olympienne Anastasia Bucsis raconte aussi son calvaire, surtout celui de s’être crue longtemps sans valeur. On peut être champion olympique de ski acrobatique et rester volontairement dans le placard tout autant durablement que des champions du monde de patinage artistique comme le fit Brian Orser qui décida d’attendre longuement avant d’admettre ce qui crevait les yeux de tout le monde. Les décennies défilent et l’abcès n’est pas encore crevé mais ça ne saurait tarder.
Il reste évident que les sports collectifs (comme le hockey américain où les hommes se tapent violemment au visage et ne visant que la tête, comme des chiens enragés) sont remplis d’homosexuels dans le placard et qu’une chape de plomb est tombée sur le sujet, pour le moment. Pourtant, sur les trois plus hautes marche du podium olympique du 100 mètres, les meilleurs (1984, 1988, 1992) étaient gais et sont restés dans le placard.
On dit facétieusement qu’en ce qui a trait aux sports collectifs universitaires que la nudité fréquente dans les salles de douche et la présence du désir homosexuel intimiderait les non-gais, que c’est cela qui est en cause! Combien tout ça est ridicule, ces obligations de mentir sur ses préjugés et de dissimuler un corps recelant bien d’autres imperfections que l’invisible désir… tout en se complaisant dans des fraternités mâles exclusives (que furent jadis l’armée, l’église, le sport hétéro masculin en équipe, etc).
Mais au lieu de brandir des érections scandaleuses le plus souvent provoquées que spontanées, grâce à nos écoles publiques d’aujourd’hui, aux professeurs et gestionnaires qui s’affichent et guident, tout ça, peu à peu, cette facétie tendra à changer, malgré la religion et la moralité des prêcheurs souvent démasqués pour tenir des propos contraires à leurs actions, loin des micros…
Une génération à omettre ce travail constant de sensibilisation scolaire et la fureur de massacrer ou blesser reprendra de la vigueur. Un coup d’oeil sur l’actualité internationale nous montre l’état de la Maison de Fous et nos fratricides guerres terrestres. Mais les meilleurs du sport, sont souvent, très souvent, gais.
Ce film offre une pierre à l’édifice de l’acceptation d’autrui via de beaux témoignages souvent bouleversants quand on a vécu soi-même les mêmes situations désagréables de rejet. Hélas, la conséquence pour les sportifs victimes de cette détestable hypocrisie sociale, c’est la dépression à répétitions, un combat constant pour lutter contre la dépréciation de soi que ces mises en scène facétieuses favorisent.
Le suicide ou l’accident du hockeyeur Brendan Burke, parmi bien d’autres autodestructions spectaculaires, s’expliquent en nuances multiples par cette hostilité accrue pour cause de préférence érotique, entre sportifs virils ou chez les femmes qui osent aimer une personne chère de leur propre mûre volonté.